J.O. 56 du 7 mars 2006
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Décision n° 2005-1103 du 15 décembre 2005 se prononçant sur un différend opposant Colt Télécommunications France à France Télécom
NOR : ARTJ0500138S
L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes,
Vu la directive 2002/19 /CE du Parlement européen et du Conseil, en date du 7 mars 2002, relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées ainsi qu'à leur interconnexion (directive « accès ») ;
Vu la directive 2002/21 /CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») ;
Vu le code des postes et des communications électroniques, notamment ses articles L. 34-8, L. 36-8 ;
Vu la loi no 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, et notamment son article 133 ;
Vu le décret no 2004-1301 du 26 novembre 2004 relatif aux dispositions applicables aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques en application des articles L. 37-1 à L. 38-3 du code des postes et des communications électroniques ;
Vu l'arrêté du 12 décembre 1996 modifié autorisant la société Colt Télécommunications France à fournir le service téléphonique au public ;
Vu l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu la décision no 99-528 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 18 juin 1999, portant règlement intérieur ;
Vu la décision no 2003-907 du 24 juillet 2003 établissant pour l'année 2004 les listes des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché des télécommunications ;
Vu la décision no 2003-1083 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 2 octobre 2003 portant modification de la décision susvisée ;
Vu la décision no 2005-0278 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 19 mai 2005, portant sur la définition du marché pertinent de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional et sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché ;
Vu la décision no 2005-0280 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 19 mai 2005, portant sur les obligations imposées à France Télécom en tant qu'opérateur exerçant une influence significative sur le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional ;
Vu la demande de règlement d'un différend, enregistrée le 19 août 2005, présentée par la société Colt Télécommunications France, RCS Paris B 402 628 838, dont le siège social est situé 25, rue de Chazelles, 75849 Paris Cedex 17, représentée par maître Winston Maxwell, Cabinet Hogan & Hartson, 69, avenue Franklin-Roosevelt, 75008 Paris ;
La société Colt Télécommunications France (ci-après Colt) demande à l'Autorité de préciser les conditions équitables, d'ordre financier, dans lesquelles la convention d'accès relative à la prestation d'accès et de collecte DSL de gros doit être assurée par France Télécom. Colt demande en particulier que ces conditions comprennent :
1. Une baisse d'au moins 75 % des tarifs de l'offre de Turbo DSL, avec effet au 1er janvier 2005 et jusqu'au 1er août 2005, date à laquelle l'ensemble du parc de liaisons de Colt sera facturé par France Télécom, sans frais de migration ni migration technique, selon la nouvelle offre tarifaire « DSL Entreprises », telle que modifiée à la suite des demandes décrites ci-dessous ;
2. Avec effet au 1er août 2005 : la fixation de l'abonnement mensuel du tarif de l'accès pour l'offre DSL Entreprises aux niveaux suivants :
ADSL, 1 paire : 20,80 euros hors taxes au plus ;
SDSL, 1 paire : 22,00 euros hors taxes au plus.
3. Avec effet au 1er août 2005 : la fixation du prix mensuel pour la prestation porte 155 Mbit/s en colocalisation dans l'offre DSL Entreprises à 92 euros hors taxes au plus.
1. Sur la négociation entre les parties
Colt rappelle que, dès le 21 octobre 2004, elle a demandé à France Télécom une baisse significative, à compter de 2005, du prix des prestations Turbo DSL, à laquelle France Télécom a répondu en renvoyant Colt à la procédure de consultation du marché de gros de l'accès haut débit menée par l'Autorité.
Colt souligne qu'elle a participé à cette consultation publique, mais sans obtenir d'assouplissement de la position de France Télécom. Colt indique que, le 7 février 2005, elle a rappelé à France Télécom ses obligations au titre de l'ancien cadre en estimant la surfacturation des prestations Turbo DSL, qui s'élèvent pour le mois de janvier 2005 à 289 158,28 euros hors taxes. Colt a fait part de son intention de ne pas s'acquitter de ce montant en soulignant l'urgence de sa demande et en indiquant qu'elle ne pouvait attendre l'issue d'un processus multilatéral.
Colt indique que France Télécom a, d'une part, répondu à cette demande en annonçant une prochaine décision tarifaire pour l'offre Turbo DSL permettant une mise en oeuvre de tarifs compatibles avec le niveau d'attente du marché et a, d'autre part, critiqué la décision unilatérale prise par Colt de ne pas payer les factures. Colt précise que France Télécom a également contesté le fait qu'il puisse y avoir un effet d'éviction de Colt sur le marché de détail car le parc d'autres opérateurs était en augmentation.
Colt indique que la nouvelle proposition tarifaire de France Télécom a été transmise aux opérateurs alternatifs par l'Autorité le 31 mars 2005. Colt estime que cette proposition appliquée au parc Turbo DSL de Colt s'est traduite par une baisse de 12 % alors qu'elle avait réclamé une baisse d'environ 75 % afin de rester compétitive sur le marché de détail. Colt a indiqué à France Télécom qu'elle avait réglé les précédentes factures mais maintenait sa demande soit « la classification de Turbo DSL comme offre de gros, l'orientation des tarifs de cette offre vers les coûts, la non-migration technique des liaisons Turbo DSL vers cette offre de gros à compter du 1er janvier 2005 ».
Le 28 avril 2005, Colt a précisé qu'elle ne pouvait pas répliquer les offres de détail de France Télécom même pour sa clientèle entreprise cible. Colt a contesté, le 13 mai 2005, trois factures de France Télécom relatives aux prestations Turbo DSL pour les mois de février, avril et mai. Colt précise que lors d'une réunion, le 17 mai 2005, France Télécom a annoncé qu'une offre de référence conforme aux projets de décision de l'Autorité était en cours de préparation mais qu'aucune date ne pouvait être donnée avant la publication des décisions de l'Autorité et qu'elle n'avait pas à donner d'indication sur le niveau tarifaire de cette offre. Colt souligne que France Télécom a confirmé que l'inducteur de coût de Turbo DSL était les débits garantis en émettant l'hypothèque que Colt paierait trop cher car elle aurait commandé des feuilles surdimensionnées en terme de débit garanti ou qu'elle souhaiterait un produit hybride entre ADSL Connect ATM et Turbo DSL, ce dernier n'étant pas le mieux adapté.
Colt indique que, le 13 juin 2005, elle a adressé une lettre à France Télécom pour rappeler les dispositions de la décision no 2005-0280 de l'Autorité et en réitérant sa demande d'une baisse de 75 % des tarifs Turbo DSL avec effet au 1er janvier 2005 en demandant à France Télécom une réponse pour le 30 juin 2005, faute de quoi elle saisirait l'Autorité.
Colt précise que, le 17 juin 2005, France Télécom a confirmé que l'offre Turbo DSL était une offre sur le marché intermédiaire des opérateurs mais qu'elle ne pouvait répondre favorablement à sa demande consistant à modifier des tarifs homologués. Colt note que France Télécom a indiqué qu'elle respecterait ses obligations et publierait une offre de référence dans les délais prévus par la décision de l'Autorité et proposerait une réunion afin de présenter cette offre.
Colt indique que, le 8 juillet 2005, elle a transmis à France Télécom les caractéristiques d'un mode de tarification permettant d'harmoniser les tarifs des offres de gros d'accès large bande de France Télécom livrées au niveau régional et consistant à :
- séparer la tarification de l'accès de celle du trafic ;
- dans la facturation du trafic, ignorer le débit crête, et facturer tronc par tronc, le maximum de deux grandeurs : le débit garanti et la consommation.
Dans ce même courrier du 8 juillet 2005, Colt réaffirme « le caractère excessif des tarifs actuels du service Turbo DSL » et indique qu'une « réduction de 75 % (par rapport aux tarifs du premier semestre 2005) est nécessaire pour que cette prestation soit conforme aux obligations réglementaires de France Télécom et cohérent avec la tarification d'autres produits France Télécom, notamment ADSL Connect et IP-ADSL ».
Colt souligne que, le 11 juillet 2005, France Télécom lui a répondu d'attendre l'offre de référence résultant de l'analyse des marchés pertinents.
Colt rappelle que, le 28 juillet 2005, France Télécom a publié son offre d'accès et de collecte DSL en réponse à la décision no 2005-0280 de l'Autorité du 19 mai 2005. Colt note que l'offre « DSL Entreprises » remplace Turbo DSL et « DSL Access » remplace ADSL Connect ATM, la structure de coût évoluant de la façon suivante :
- baisse tarifaire globale sur le parc de Colt de 37 % par rapport au début de l'année et de 25 % par rapport au 1er juillet, soit la moitié des 75 % demandés par Colt et nécessaires pour qu'elle puisse être compétitive sur le marché de détail des entreprises nationales et PME pour les prestations IP-VPN ;
- date d'application au 1er décembre 2005, bien que, lors d'une réunion en date du 28 juillet 2005, France Télécom ait remis une estimation à 1 % près de l'impact de cette baisse sur le prix total récurrent encouru par Colt, montrant que le système de facturation pouvait s'adapter rapidement ;
- l'offre DSL Entreprises est structurée en trois parties :
- portes à un tarif inchangé par rapport au 1er juillet 2005 et restant 9,6 fois plus élevé que celui de Broba II, l'offre DSL régionale de Belgacom en Belgique : 888 euros par mois contre 92,40 euros par mois pour Broba II ;
- trafic ATM, dont le prix est aligné sur les tarifs d'ADSL Connect ATM ;
- accès : 65 euros par mois pour une paire en ADSL, là où le tarif de Broba II est inférieur à 18,5 euros par mois et où le tarif d'ADSL Connect ATM est à 14,2 euros par mois (auquel il faut ajouter une dizaine d'euros pour l'usage des fréquences basses).
Colt souligne que, le 29 juillet 2005, elle a écrit à France Télécom pour s'opposer, d'une part, à la tarification abusive des portes ATM en colocalisation et des accès dans la nouvelle offre DSL Entreprises et, d'autre part, en demandant une baisse de ces deux éléments dans les quinze jours, courrier auquel France Télécom a répondu le 10 août 2005 en refusant ces demandes.
Colt précise que, le 3 août 2005, elle a adressé de nouvelles contestations à France Télécom relatives à ses factures Turbo DSL.
2. Argumentaire
2.1. Historique de Turbo DSL
Colt indique, d'une part, que l'offre Turbo DSL est considérée par France Télécom comme un service de détail et homologuée dans le cadre de l'ancien article L. 36-7 (5°) du code des postes et des télécommunications et, d'autre part, que l'offre Turbo DSL n'a jamais été de fait confrontée aux contraintes d'un produit d'interconnexion ou d'accès spécial, ni à l'article L. 34-8-IV du code des postes et des communications électroniques (ci-après CPCE) imposant l'orientation vers les coûts.
Colt indique en revanche que la version résidentielle du produit, ADSL Connect ATM (notée « ACO »), a été soumise dès son origine aux règles de l'interconnexion et de l'accès et que, dans son analyse des marchés, l'Autorité a reconnu que l'offre Turbo DSL est devenue de fait un accès spécial, équivalent au produit ACO.
Colt précise que cette différence de traitement explique les situations contrastées sur les marchés de détail respectifs. Sur le marché professionnel, Colt indique que Transpac/Oléane conserve 70 % du marché, alors que sur le marché résidentiel la part de marché de Wanadoo est passée de 80 % à 45 %.
Colt souligne qu'elle a demandé à France Télécom un changement radical de la tarification de l'offre Turbo DSL afin de pouvoir concurrencer Transpac/Oléane. Colt constate que sur le marché des IP-VPN et de l'accès internet pour les PME les prix de détail ont chuté de 50 % alors que les coûts de Colt, notamment en Turbo DSL, n'ont chuté que de 10 % environ. Colt note que seule une baisse de 75 % du coût global de Turbo DSL lui permettrait de rester compétitive.
Suite à ces demandes, Colt indique que les tarifs de Turbo DSL ont baissé de 12 % en moyenne en 2005, baisse que Colt considère comme insuffisante.
Colt estime que la nouvelle offre DSL Entreprises conduit à une baisse insuffisante de 37 % par rapport au 1er janvier 2005 et qu'elle maintient une tarification excessive des portes et des accès, sans rapport avec les coûts, et qui avantage Transpac/Oléane de manière indue.
2.2. Les tarifs de Turbo DSL sont excessifs par rapport à ACO
Colt indique que l'offre Turbo DSL devait être orientée vers les coûts sous l'ancien cadre, au même titre que sous le nouveau cadre. Colt indique que lorsque l'offre Turbo DSL est achetée par un opérateur l'offre devrait être considérée comme un produit de gros et être régulée en conséquence. Colt estime que sous l'ancien cadre, en tant que « prestation d'accès spécial », l'offre devait répondre aux contraintes des articles 16 et 17 de la directive 98/10 /CE et de l'ancien article L. 34-8-IV du code, imposant l'orientation vers les coûts. L'entrée en application de la décision no 2005-0280 de l'Autorité reprend l'obligation de reflet des coûts correspondants, les tarifs ne devant pas être marqués par des effets de seuil. Colt considère que cette obligation n'est pas respectée et l'évolution de l'offre ACO illustre le caractère excessif de ce décalage.
Colt développe une comparaison globale, technique et tarifaire entre Turbo DSL et ACO. Colt précise, d'une part, que ces deux offres sont techniquement proches, à ceci près que dans Turbo DSL un débit minimum est garanti pour chaque accès, ce qui résulte d'un paramétrage individuel des VC et, d'autre part, que cette différence ne peut expliquer la différence de prix.
Concernant la tarification des débits, Colt indique qu'elle cherche à apprécier le rapport de facturation entre le débit crête et le débit garanti. L'opérateur évalue le surcoût du débit garanti de 20 à 30 % par rapport au débit crête, en se fondant sur des offres similaires à l'étranger ou sur d'autres offres du groupe France Télécom. Pour l'offre Turbo DSL, Colt précise qu'elle paie actuellement un surcoût de 560 % pour la prestation débit garanti.
Colt ajoute qu'il faut prendre en compte une différence de prix d'environ 10 euros par mois par rapport à ACO (due à la nécessité d'avoir un abonnement téléphonique préalable dans ce cas). Colt souligne que les frais d'installation et de mise en service plus élevés dans Turbo DSL sont pris en compte dans les FAS et non dans le tarif récurrent mensuel.
Suite à ces différentes comparaisons qu'elle développe en annexes de ses écritures, Colt indique qu'elle évalue à 30 % par mois le surcoût lié à la production des accès professionnels par rapport aux accès résidentiels. Colt note que le solde entre cette valeur de 30 % et celle liée à sa propre facturation en Turbo DSL (560 %) correspond à une rente de monopole ou à une subvention croisée. Colt rappelle que si ces comportements étaient proscrits dans l'ancien cadre, ils le demeurent dans le nouveau. Colt indique que ceci est dû au fait que, contrairement aux accès résidentiels, les accès professionnels n'ont jamais été exposés à une régulation adéquate et n'ont jamais fait l'objet de litige devant le Conseil de la concurrence ou l'Autorité.
Colt souligne que la nouvelle offre DSL Entreprises rapproche l'offre professionnelle de l'offre résidentielle en alignant la structure tarifaire et les prix de la prestation de collecte sur cette dernière. En revanche, Colt considère que le tarif de la prestation d'accès est trois fois supérieur à celui de l'accès résidentiel, alors que les coûts sous-jacents ne sont pas trois fois supérieurs et que le prix des portes est trop élevé et favorise Transpac/Oléane par des effets de seuil.
2.3. Les tarifs de Turbo DSL sont excessifs par rapport à Broba II
Colt précise que l'offre Broba II de Belgacom en Belgique, adressant à la fois les marchés résidentiel et professionnel grâce à un large choix de débits crêtes et garantis et de qualité de service, est comparable aux offres Turbo DSL ou DSL Entreprises. Afin d'évaluer la différence entre ces deux offres, Colt applique à son propre parc Turbo DSL la grille tarifaire de l'offre belge. Elle en déduit :
- que les tarifs Turbo DSL du 1er janvier 2005 devraient baisser de 65 % ;
- que les tarifs Turbo DSL du 1er juillet 2005 devraient baisser de 61 % ;
- que les tarifs de DSL Entreprises devraient baisser de 49 %.
Colt estime, d'une part, que cette dernière différence tient essentiellement à la tarification excessive des portes et des accès et, d'autre part, que dans l'offre Broba II une porte à 155 Mbit/s colocalisée est tarifée 92,40 euros par mois contre 888 euros dans l'offre DSL Entreprises, soit neuf fois plus cher. Colt indique que le prix mensuel d'un accès ADSL est de 18,50 euros dans Broba II contre 65 euros par mois dans DSL Entreprises, soit trois fois plus cher.
2.4. Les tarifs de Turbo DSL sont excessifs par rapport à l'étude de coûts Analysys
Sur la base d'un modèle de coût développé par le cabinet Analysys, transmis à l'Autorité en décembre 2003 et mis à jour par Colt selon les grilles tarifaires en vigueur, Colt indique que les tarifs de Turbo DSL en vigueur au premier semestre 2005 devraient baisser pour être « corrects » de la manière suivante :
- de 67 % pour les tarifs T0 ou T ;
- jusqu'à 79 % pour les tarifs T3.
2.5. Les tarifs de Turbo DSL sont excessifs par rapport à CE2O
Colt indique tout d'abord que les spécificités de l'offre CE2O ne permettent de comparaison avec Turbo DSL que sur la prestation de collecte. Sur ce segment et pour des débits comparables à ceux de Turbo DSL, Colt estime que l'option débit garanti coûte 11 % plus cher que l'option débit crête.
Colt souligne que ces différents éléments constituent un faisceau d'indices montrant que le juste prix de Turbo DSL devrait se situer entre 20 % et 30 % au-dessus du prix de l'offre ACO et non à 560 % de ce prix.
2.6. Approche tarifaire fondée sur la consommation
Colt expose ensuite une méthode de tarification inspirée du mode de tarification du produit IP-ADSL et qui présente les avantages suivants :
- elle applique les principes énoncés par l'Autorité dans sa décision no 2005-0280 ;
- elle n'incite pas les opérateurs à proposer des offres incitant le public à ne pas respecter les droits de propriété intellectuelle ;
- elle permet aux opérateurs de définir sans ambiguïté leur engagement de qualité de service auprès de leur client.
Colt estime que selon cette méthode le trafic ATM serait tarifé de la manière suivante :
- la somme des débits garantis des VC ou du VP, d'une part ;
- le débit moyen réel du VP (au 95e percentile), d'autre part.
Suite à la publication de l'offre DSL Entreprises, Colt indique retirer sa demande liée à la mise en oeuvre de cette méthode de facturation, bien qu'elle n'ait pas été retenue par France Télécom.
2.7. La position de Transpac/Oléane sur le marché aval
Colt indique qu'à la sortie de l'offre Turbo DSL, alors constituée de 27 zones de collecte, elle bénéficiait de la même structure d'achat que Transpac grâce à son propre réseau national. Colt note que l'évolution de l'offre a conduit à démultiplier le nombre de zones de collecte, pour atteindre le nombre de 123, et indique que sa situation s'est détériorée par rapport à celle de Transpac.
En effet, Colt indique que Transpac peut s'appuyer sur un réseau capillaire, financé grâce à une situation historique de monopole, pour multiplier le nombre de portes, chacune d'elles conservant un débit élevé, ceci permettant en définitive à Transpac de bénéficier d'un coût unitaire plus faible.
Colt estime alors que seule une baisse importante du prix des portes en colocalisation lui permettrait « de se battre à armes égales » avec Transpac/Oléane. Colt estime que compte tenu des tarifs actuels, l'ouverture d'une nouvelle porte colocalisée par un opérateur « dédié entreprise » n'est justifiée qu'à partir d'un seuil de 70 liaisons prévues dans un horizon de douze mois. Colt observe que ce seuil crée une importante barrière à l'entrée.
Colt indique alors qu'une baisse du prix des portes l'encouragera à une plus grande capillarité de son réseau puisque, bénéficiant de coûts unitaires plus faibles, elle pourra accroître le nombre de ses raccordements.
Colt souligne enfin qu'elle entend poursuivre ses efforts en matière d'investissements pour la maîtrise de la boucle locale, mais que ces efforts ne peuvent être consentis que si l'opérateur peut s'appuyer sur un volant de clientèle IP-VPN stable ou en croissance. Or, Colt considère que pour cette clientèle seule une baisse des tarifs de Turbo DSL, avec effet au 1er janvier 2005, lui permettra de se battre sur un pied d'égalité avec Transpac.
Vu le courrier de l'adjoint au chef du service juridique, en date du 29 août 2005, adressé aux parties leur transmettant le calendrier de dépôt des mémoires et portant désignation des rapporteurs ;
Vu les observations en défense enregistrées le 23 septembre 2005 présentées par la société France Télécom, RCS Paris no 380.129.866 Paris, dont le siège social est situé 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, représentée par M. Jacques Champeaux, directeur exécutif chargé des affaires réglementaires ;
1. Sur la présentation des faits effectuée par Colt
France Télécom indique que, par courrier du 7 janvier 2005, Colt souhaitait obtenir à compter de 2005 une baisse significative du prix de l'offre Turbo DSL et qu'elle a réitéré ses demandes jusqu'au mois de juin 2005.
France Télécom a rappelé à Colt qu'elle était contrainte sur la tarification de son offre Turbo DSL et qu'elle ne pouvait modifier les principes tarifaires de cette offre, ce qu'elle a confirmé par courrier du 21 mars 2005 en précisant que l'offre Turbo DSL devait faire l'objet d'une homologation tarifaire. France Télécom estime que Colt ne pouvait lui demander cette baisse dès lors que les tarifs qui lui étaient opposés en 2005 ont fait l'objet de deux avis de l'Autorité et ont été homologués. France Télécom souligne que les deux avis rendus par l'Autorité ont continué à indiquer que le niveau tarifaire de l'offre Turbo DSL demeurait placé sous l'empire des dispositions de l'article 17 du cahier des charges telles qu'approuvées par le décret no 96-1225 du 27 décembre 1996.
France Télécom considère que les demandes de Colt ne portaient que sur la révision à la baisse des tarifs de l'offre Turbo DSL dont l'évolution ne pouvait procéder d'une décision unilatérale de France Télécom. France Télécom estime donc que Colt ne peut soutenir que des négociations aient pu être ouvertes par France Télécom sur ce point sauf à reconnaître qu'elle aurait accepté de s'exonérer de ses obligations réglementaires.
S'agissant de l'offre DSL Entreprises, France Télécom rappelle que des négociations ont été menées lors du processus d'association des opérateurs sur son offre « bitstream ». France Télécom précise que, lors de réunions multilatérales du 7 et 22 juin avec l'Autorité, la position de Colt n'était pas partagée sur l'évolution des tarifs.
France Télécom indique, d'une part, que Colt a fait part de sa position à l'Autorité et, d'autre part, qu'elle reconnaît continuer de contester la tarification de l'offre Turbo DSL qui fait l'objet d'un encadrement strict tout en négociant l'obtention d'une tarification plus favorable au titre de l'offre de gros que France Télécom doit fournir aux opérateurs conformément à la décision no 2005-0280 de l'Autorité. France Télécom considère que la coexistence de deux régimes juridiques ne peut conduire à réformer une offre déjà approuvée dans le cadre du contrôle des tarifs de détail par les autorités réglementaires ou à ce que soit modifiée l'offre de gros proposée aux opérateurs selon des principes qui ne sont pas partagés par le secteur. France Télécom estime que Colt ne peut également conclure à une fin de non-recevoir de la part de France Télécom car elle a pris acte des avancées très positives de son offre de gros. France Télécom note que Colt a saisi l'Autorité prématurément et sans considération de la volonté de dialogue entre les parties.
France Télécom précise qu'elle n'a pas souhaité rompre les négociations et a proposé le 10 août 2005 à Colt de mener une collaboration efficace sur les offres de gros en DSL en lui indiquant qu'elle était prête à prendre en considération ses demandes et qu'elle ne souhaitait pas avoir une position fermée par rapport aux attentes de Colt. France Télécom note que malgré sa proposition, Colt a saisi l'Autorité et a clos elle-même les négociations le 19 août 2005.
France Télécom rappelle que sa volonté est de permettre aux discussions de progresser et qu'elle a proposé un tarif particulier pour l'offre multi-interface où, au niveau de l'abonnement, elle facture le prix d'une porte à 90 Mbits au lieu de trois portes à 30 Mbits/s. France Télécom estime qu'elle a cherché à détailler et faire évoluer au mieux ses propositions depuis le message électronique du 7 juillet 2005 chiffrant deux scenarii de migration, selon la segmentation des portes Turbo DSL, afin d'aider Colt à préciser ses demandes.
France Télécom précise que le 19 août 2005 elle a fait parvenir à Colt un scénario « global » par lequel elle consentait un effort tarifaire supplémentaire et prenant en compte le cas d'une migration massive des accès. France Télécom indique que cette proposition s'accompagnait d'une proposition chiffrée afin de satisfaire la demande de Colt.
France Télécom considère, d'une part, que Colt ne peut prétendre que France Télécom a refusé toute avancée et, d'autre part, que Colt a saisi l'Autorité sans volonté de compromis car elle n'a pas souhaité faire part des précisions demandées postérieurement au 10 août 2005 alors que les discussions portaient sur une offre de France Télécom qui n'était pas publiée et connue que depuis le 27 juillet 2005.
2. Sur l'irrecevabilité de la saisine de Colt
France Télécom estime que la saisine déposée par Colt ne remplit pas les conditions de recevabilité prévues à l'article L. 36-8 du CPCE et que l'Autorité ne peut donc faire droit aux demandes de Colt.
2.1. Sur l'échec des négociations
France Télécom indique que Colt ne peut prétendre à un échec des négociations au sens du CPCE alors que France Télécom n'a pas opposé une fin de non-recevoir à ses demandes mais qu'elle a continué à poursuivre les discussions.
France Télécom précise qu'à la suite du message électronique du 19 août 2005 portant sur des propositions commerciales concernant la migration de portes Turbo DSL vers des sites colocalisés et la mise en place d'une porte Turbo DSL avec trois interfaces dédiées, Colt a pris acte de cette proposition par message électronique du 30 août 2005 afin d'obtenir de France Télécom des précisions qui laissent peu de doute sur le fait qu'il y ait rupture dans les discussions commerciales entre les parties. France Télécom a répondu à ce courrier le 7 septembre 2005.
France Télécom constate que la saisine de Colt n'est accompagnée d'aucun document susceptible d'attester un échec des négociations sur son offre de gros sauf à considérer que France Télécom aurait pu accéder à la demande de Colt sur le tarif Turbo DSL et à déroger ainsi à ses obligations réglementaires en matière de contrôle tarifaire, ce qui est sanctionné par l'article L. 36-11 du CPCE.
Pour ces motifs, France Télécom estime que l'Autorité ne peut déclarer recevable la saisine déposée par Colt. France Télécom constate que Colt démontre en fait qu'il revient à France Télécom d'avoir mené des négociations de bonne foi afin d'aboutir à un accord, alors que l'objectif de Colt était de faire trancher par l'Autorité les conditions techniques et tarifaires de l'offre Turbo DSL et de l'offre DSL Entreprises quel que soit l'avancement des discussions entre les parties.
2.2. Sur la fixation d'un nouveau tarif pour l'offre Turbo DSL
L'offre Turbo DSL ne relève pas du périmètre de l'article L. 36-8
France Télécom rappelle que dans son avis de 2000 sur les tarifs de l'offre Turbo DSL l'Autorité avait indiqué que cette offre s'adressait aux entreprises et aux opérateurs et consistait en une prestation de transport de données en mode ATM entre un site central du client et des sites extrémités.
France Télécom souligne que cette offre est aussi commercialisée auprès de fournisseurs et d'utilisateurs finals qui n'ont pas la qualité d'opérateurs et ne sont pas éligibles à la procédure de règlement de différend et que par conséquent une évolution résultant d'un différend méconnaîtrait les dispositions spécifiques liées au contrôle ex ante de cette offre.
France Télécom estime que les tarifs de l'offre Turbo DSL font l'objet d'un contrôle ex ante au titre de l'article 17 de son cahier des charges confié aux autorités de tutelle : une évolution tarifaire décidée en dehors de ce cadre méconnaîtrait donc les dispositions réglementaires et la volonté du régulateur. France Télécom considère que Colt ne peut réclamer qu'il soit dérogé aux modalités de contrôle du tarif qui ont été maintenues par le législateur.
France Télécom rappelle que l'article 17-2 de son cahier des charges prévoit que les tarifs à destination des utilisateurs pour lesquels il n'y a pas de concurrence sont soumis aux ministres chargés des télécommunications ainsi qu'à l'Autorité. France Télécom souligne que, conformément à la réglementation et aux dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE, l'offre Turbo DSL ne peut donc être modifiée.
L'offre Turbo DSL ne peut être modifiée rétroactivement
France Télécom rappelle la jurisprudence administrative selon laquelle un règlement comportant un effet rétroactif est entaché d'une incompétence ratione temporis dans la mesure où les auteurs de ce règlement empiètent sur la compétence de leurs prédécesseurs. Par suite, France Télécom souligne que l'Autorité empiéterait ainsi sur la compétence dont disposait le ministre pour homologuer l'offre Turbo DSL.
France Télécom estime que le principe de non-rétroactivité suppose qu'il ne peut être fait droit à une demande relative à une prestation dont les conditions ont été définies par un acte réglementaire pour la période considérée. France Télécom note que c'est le cas car le tarif de l'offre Turbo DSL a été placé en 2005 sous l'empire de deux décisions de la DIGITIP. France Télécom précise que le 12 octobre 2004, la DIGITIP l'informait de sa décision d'homologuer la décision tarifaire no 2004-108. France Télécom indique que, le 27 mai 2005, la DIGITIP a donné acte de l'homologation de la décision tarifaire no 2005-019 au regard de l'avis favorable rendu par l'Autorité.
Pour ces motifs, France Télécom demande à l'Autorité de constater l'irrecevabilité de la demande de Colt dès lors qu'elle remet en cause des droits acquis.
France Télécom rappelle que l'Autorité s'est déjà déclarée incompétence sur une telle demande lors d'un différend opposant MFS Communications à France Télécom et que, par suite, l'Autorité ne pourra que rejeter les demandes de Colt.
2.3. Les demandes de Colt ne sauraient aboutir à faire constater
une pratique anticoncurrentielle
Colt méconnaît les compétences du régulateur
France Télécom constate que les demandes de Colt ne se fondent pas sur le tarif de France Télécom mais sur les tarifs d'éviction pratiqués par Transpac qui sont sans lien avec la présente procédure, et qu'il en est de même lorsque Colt souligne l'abus de position dominante de la part de France Télécom.
France Télécom constate que Colt fait l'impasse sur les dispositions régissant l'offre Turbo DSL qui ont été reconduites par la loi du 9 juillet 2004 et méconnaît les dispositions applicables à l'offre Turbo DSL, qui n'étaient pas celles de l'accès. France Télécom rappelle que dans son avis no 2000-378 du 18 avril 2000 relatif à la généralisation de l'offre Turbo DSL l'Autorité indiquait que le régime applicable à l'offre Turbo DSL était celui des liaisons louées, soit celui d'une offre de détail homologuée.
France Télécom indique que l'Autorité précisait également que pour qu'une offre soit qualifiée d'accès il fallait qu'elle adresse seulement les opérateurs.
France Télécom rappelle que l'Autorité a aussi eu l'occasion de se déclarer incompétente dans sa décision no 2000-703 pour se prononcer au titre de l'article L. 36-8 du CPCE sur un abus de position dominante ainsi que l'y invite Colt pour réviser le tarif de l'offre Turbo DSL.
Par conséquent, France Télécom estime qu'il n'appartient pas à l'Autorité, sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE, de se prononcer sur un abus de position dominante allégué par Colt.
Sur la remise en cause de la légalité des décisions d'homologation
et la portée des avis de l'Autorité pour les prestations de 2005
France Télécom s'étonne de la demande de Colt réclamant que l'Autorité constate le non-respect des obligations réglementaires de France Télécom relatives à l'offre Turbo DSL, dans la mesure où Colt a reconnu l'intérêt de cette offre pour le développement d'une concurrence effective et rappelé que toutes ses évolutions se faisaient sous l'égide de l'Autorité.
France Télécom rappelle que dans son avis no 2005-0397 du 12 mai 2005 l'Autorité a noté « que s'agissant des tarifs des portes et de l'option "gestion de CoS, (...) l'évolution proposée correspond à une rationalisation des tarifs de l'offre et à une mise en cohérence accrue avec l'offre ADSL Connect ATM ». France Télécom estime donc que l'Autorité ne peut revenir sur l'avis favorable donné précédemment. France Télécom observe que l'Autorité, dans ses deux avis favorables émis sur les tarifs de l'offre Turbo DSL concernant la période 2005, a procédé à des analyses de l'offre de France Télécom.
France Télécom précise que, dans un courrier en date du 19 janvier 2004, l'Autorité l'a interrogé sur le traitement dont bénéficie Transpac afin de vérifier que la structure tarifaire de l'offre n'avantagerait pas cette dernière. France Télécom souligne d'ailleurs que l'avis no 2004-162 de l'Autorité du 10 février 2004 démontre que Colt ne peut estimer que l'offre Turbo DSL avantagerait Transpac.
2.4. Colt souhaite obtenir dans un cadre bilatéral des modifications n'étant pas souhaitées par l'ensemble des opérateurs
France Télécom souligne que les échanges avec Colt démontrent que celle-ci a tenté d'obtenir une évolution de l'offre de référence de France Télécom qui ne recueille pas l'avis de tous les opérateurs.
France Télécom rappelle que, dans son communiqué de presse du 27 juillet sur la publication de l'offre de référence de France Télécom, l'Autorité démontre que l'offre de France Télécom s'adresse aux différents opérateurs et qu'elle n'a pas souhaité indiquer les évolutions demandées par Colt. France Télécom estime que Colt souhaite obtenir une décision conduisant à favoriser spécifiquement son architecture de réseau et son développement commercial, là où l'offre de gros de France Télécom représente un remède dont les opérateurs du marché doivent bénéficier dans des conditions ne pouvant favoriser l'un d'entre eux.
France Télécom souligne que la demande de Colt conduit à étendre la contrainte imposée à France Télécom au titre de l'analyse des marchés effectuée par l'Autorité en intensifiant en pratique l'un des remèdes alors qu'il a été fixé à la suite de l'appréciation d'éléments quantitatifs et qualitatifs collectés par l'Autorité dans le cadre de cette analyse.
3. Sur l'absence de justification technique et économique à l'évolution de la tarification de DSL entreprises
3.1. Sur l'absence de critiques adressables à l'offre Turbo DSLL'offre est satisfaisante sur le marché des opérateurs
France Télécom indique que l'Autorité a souligné dans sa décision no 2003-27 l'effet positif de Turbo DSL sur la concurrence.
France Télécom précise que, conformément à l'appréciation de l'Autorité dans le cadre de ses avis tarifaires ou du règlement de différend opposant France Télécom à LDCOM en 2003, le dynamisme de l'offre Turbo DSL est avéré, avec un quadruplement du nombre d'accès en 2004 et une croissance continue du nombre d'accès supplémentaires par an.
France Télécom justifie ce dynamisme par sa politique volontariste forte sur le marché des opérateurs, qui constitue 94 % du marché de l'offre.
France Télécom indique avoir toujours cherché à faire évoluer Turbo DSL pour répondre aux attentes diversifiées des opérateurs, segmentés en deux catégories :
- les opérateurs fortement déployés adressant à la fois les marchés professionnel et résidentiel. Ces opérateurs sont particulièrement sensibles à l'évolution des tarifs T0 et T1 de l'offre Turbo DSL.
- les opérateurs dont le réseau est peu capillaire, adressant uniquement le marché professionnel. Ces opérateurs sont particulièrement sensibles à l'évolution des tarifs T2 et T3 de l'offre Turbo DSL.
France Télécom donne plusieurs exemples d'adaptation de l'offre aux besoins des clients :
- ouverture des liaisons à débits symétriques (DT no 2002079 du 11 juillet 2002) ;
- création de liaisons à débits symétriques à 4 Mb/s (DT no 2003160 du 17 juillet 2003) ;
- création de l'option « Livraison Express » (DT no 2003161) ;
- création de l'option « IMS renforcée » (DT no 2005019 du 23 mars 2005).
France Télécom estime donc que les griefs de Colt sont en contradiction avec la réalité du marché.
Les évolutions de Turbo DSL ont toujours été profitables aux opérateurs peu capillaires
France Télécom rappelle que les évolutions tarifaires de Turbo DSL ont conduit à un rapprochement constant entre le tarif des liaisons T0/T1 et celui des liaisons T2/T3. Ainsi, France Télécom mentionne l'avis no 2004-162 de l'Autorité constatant sur la période juillet 2001-septembre 2003 que la modification dans la structure tarifaire de Turbo DSL tendait à améliorer la situation d'un opérateur construisant ses offres à destination du marché de détail et à dégrader celle d'un opérateur intermédiaire.
France Télécom précise avoir réactualisé annuellement le tarif des liaisons Turbo DSL depuis 2003. France Télécom rappelle ainsi que, comme l'indique l'avis de l'Autorité no 2002-796 du 8 octobre 2002 relatif à la décision tarifaire no 2002079, la baisse des tarifs des liaisons asymétriques a favorisé les opérateurs peu déployés. En décembre 2003, de nouvelles évolutions tarifaires ont engendré également une baisse plus élevée sur les tarifs utilisés par les opérateurs peu déployés et sur les débits garantis les plus élevés. L'Autorité avait alors fait état d'un « double mouvement, celui d'une baisse générale des tarifs et celui d'un « aplatissement » de la structure des tarifs » dans son avis no 2004-162.
Parallèlement, France Télécom indique avoir baissé de 20 % le tarif de l'abonnement mensuel des portes Turbo DSL de débit compris entre 30 à 120 Mbit/s, contre 10 % pour les portes de débits de 180 et 240 Mbit/s, favorisant également les opérateurs de plus petite taille.
Colt a toujours bénéficié au mieux des évolutions de Turbo DSL
Au regard de la consolidation continue de près de 6 % par an du chiffre d'affaires de Colt entre 2001 et 2004, France Télécom juge non fondées les menaces d'exclusion du marché des services IP-VPN que feraient peser sur Colt les effets conjugués de l'effondrement des tarifs sur le marché de détail et l'évolution insuffisante des tarifs de Turbo DSL.
France Télécom en déduit au contraire que cette croissance ne peut s'expliquer, compte tenu de l'effondrement des tarifs de détail, que par un gain de part de marché de la part de Colt ou une politique commerciale et marketing fondée sur une forte différenciation de ses offres permettant de la préserver des turbulences du marché.
France Télécom indique que la structure d'achat de l'offre Turbo DSL par Colt lui permet d'en tirer un meilleur profit qu'un opérateur moyen, du fait des diverses autres solutions s'offrant à Colt pour raccorder ses clients (dégroupage ou utilisation de ses propres boucles locales en zones de forte capillarité, souscription à l'offre concurrente d'un opérateur tiers en zones de faible capillarité). France Télécom calcule ainsi que le prix de revient d'une feuille 1cA évaluée pour la structure géographique du parc de Colt est inférieure de 0,1 euro par rapport à un opérateur moyen du marché et inférieure de 11 euros par rapport à un opérateur fortement déployé. Pourtant, sur le parc réel, en incluant le coût des portes, cette seconde comparaison conduit à une différence de 26,5 euros en défaveur de Colt par rapport à un opérateur fortement déployé, qui s'explique par les débits moyens nettement plus élevés vendus par Colt à ses clients. L'écart de prix pour Colt n'est donc dû qu'à sa politique commerciale visant les clients à forts besoins de débit. France Télécom précise également que le coût des portes ramené à la feuille est marginal : 1,9 euro par mois par feuille de différence entre Colt et un opérateur fortement déployé.
3.2. Sur la politique tarifaire de France Télécom
La politique tarifaire de France Télécom ne désavantage pas Colt sur le marché des offres IP-VPN
France Télécom souligne que la baisse des prix sur le marché de détail des IP-VPN ne peut être imputable à la politique commerciale de Transpac, contrairement aux affirmations de Colt :
- le développement des offres Turbo DSL et de dégroupage ont permis l'essor d'une concurrence évidente sur le marché aval des accès professionnels, qui affiche aujourd'hui une dynamique certaine ;
- si France Télécom a favorisé le développement de la concurrence, elle ne peut être désignée comme responsable des turbulences propres à ce marché. France Télécom cite notamment une interview dans le Journal du net de Jérôme de Vitry, CEO de Completel Europe, où celui-ci désignait Neuf et Cegetel comme les principaux instigateurs de cette baisse ;
- l'annonce d'investissements de 84 millions d'euros dans le dégroupage par Completel est révélatrice de la bonne santé du marché des services aux entreprises.
L'offre DSL Entreprises ne présente pas d'anomalie par rapport à l'offre résidentielle
Bien qu'ayant cherché à homogénéiser au mieux les structures tarifaires de DSL Entreprises et ACO, France Télécom réfute l'analyse de Colt indiquant que ces deux offres sont structurellement très proches.
France Télécom précise que, contrairement à l'offre ACO destinée au marché résidentiel, DSL Entreprises s'adresse au marché professionnel et doit donc répondre à ses exigences de qualité de service, de sécurité et de niveau de service. De nombreux surcoûts sont donc à prendre en considération, notamment :
- installation et mise en service : pré requis d'un abonnement téléphonique en ACO alors que DSL Entreprises est construite sur une ou plusieurs paires de cuivre dédiées à l'accès DSL. La construction de ligne est plus complexe en DSL Entreprises qu'en ACO car de nombreux processus complémentaires nécessitent d'être pilotés humainement, par des interlocuteurs dédiés ;
- gestion des signalisations : les engagements de qualité de service et de débits proposés en DSL Entreprises étant nettement supérieurs à ceux de l'offre ACO, les moyens requis et le coût de qualification du personnel sont supérieurs. Un taux de signalisation supérieur sur DSL Entreprises par rapport à ACO nécessite des effectifs plus nombreux affectés à l'accueil et au pilotage du SAV [...] ;
- paire de cuivre : ACO ne supporte que les coûts relatifs à la bande haute, contrairement à DSL Entreprises qui en supporte l'intégralité des coûts ;
- accès DSLAM : les cartes SDSL sont plus chères et moins remplies que les cartes ADSL en moyenne, ce qui engendre un surcoût ;
- le coût des liens inter-DSLAM dépend fortement des débits moyens de chaque offre, et est donc variable entre ACO et DSL Entreprises.
Remarques de France Télécom sur la comparaison avec Broba II présentée par Colt
France Télécom souligne que contrairement à ce qu'indique Colt dans son mémoire :
- les tarifs Turbo DSL et DSL Entreprises incluent une GTR de 4 heures ouvrées ainsi qu'une IMS annuelle inférieure ou égale à 20 heures ;
- il est incorrect d'inclure 176 accès T3 tarifés au prix de l'offre Turbo DSL dans le calcul portant sur les tarifs de DSL Entreprises.
France Télécom souligne le manque de visibilité de l'offre Broba II par rapport à sa propre offre. France Télécom indique avoir privilégié la simplification et la lisibilité de ses tarifs.
France Télécom précise que la comparaison de Colt l'amène à constater un renchérissement de 160 % du coût du trafic ATM dans Broba II par rapport à DSL Entreprises.
France Télécom note que le tarif de 92,40 euros annoncé par Colt comme étant celui d'une porte 155 Mbit/s colocalisée avec Broba II ne figure pas dans l'annexe 6 « Pricing and billing » de cette offre. France Télécom s'interroge sur le fait que ce chiffre puisse être issu d'une offre sur mesure faite à Colt.
France Télécom fait remarquer que Colt compare un tarif de porte colocalisée de Broba II à un tarif non colocalisé de France Télécom, deux fois plus cher.
France Télécom dresse son propre tableau comparatif entre Broba II et DSL Entreprises, sur les prestations de trafic et de raccordement. Il en ressort une surfacturation de 22 % pour Broba II par rapport à DSL Entreprises.
En ce qui concerne la prestation d'accès et le facteur 3,5 mis en avant par Colt entre les 18,4 euros de l'offre Broba II et les 65 euros de DSL Entreprises, France Télécom renvoie à la comparaison développée préalablement entre les caractéristiques de ces deux accès.
Pour ces motifs, France Télécom demande à l'Autorité de rejeter l'ensemble des demandes de Colt et de constater que c'est en infraction des accords liant les parties et en méconnaissance des dispositions réglementaires encadrant le niveau tarifaire de l'offre Turbo DSL que la société Colt s'est affranchie du paiement des factures dues pour les prestations fournies par France Télécom en la matière ;
Vu les observations en réplique enregistrées le 14 octobre 2005 présentées par la société Colt Télécommunications France ;
Dans ses observations en réplique, Colt vient modifier ses demandes. Elle demande à l'Autorité de préciser, à la suite de l'échec des négociations commerciales et du désaccord sur l'exécution de la convention d'accès relative à la prestation d'accès et de collecte de gros, les conditions équitables, d'ordre financier, dans lesquelles cet accès doit être assuré par France Télécom et notamment que ces conditions comprennent :
1. « La fixation d'un tarif pour la prestation Turbo DSL fournie à Colt à un montant égal à 25 % du montant demandé par France Télécom avec effet au 1er janvier 2005 et jusqu'au 22 juin 2005, date à laquelle l'ensemble du parc de liaisons de Colt sera facturé par France Télécom, sans frais de migration, ni de migration technique, selon la nouvelle offre tarifaire DSL Entreprises, telle que modifiée à la suite des demandes décrites en 2° et 3° ci-dessous ;
2. Avec effet au 22 juin 2005, date de la prise d'effet de la décision no 2005-0280 : la fixation de l'abonnement mensuel du tarif de l'accès pour l'offre DSL Entreprises aux nivaux suivants :
ADSL, 1 paire : 20,80 euros hors taxes au plus ;
SDSL, 1 paire : 22,00 euros hors taxes au plus.
3. Avec effet au 22 juin 2005 : la fixation du prix mensuel pour la prestation porte 155 Mbit/s en colocalisation dans l'offre DSL Entreprises à 92,00 euros hors taxes au plus ».
Colt demande en outre, afin de respecter le principe du contradictoire que le contenu de la future consultation publique sur la méthode d'évaluation des coûts pour l'offre « bitstream » soit intégrée dans le questionnaire.
Colt rappelle que de telles demandes additionnelles sont permises en cours de procédure au regard de la décision no 2000-489 de l'Autorité, et que ses nouvelles demandes présentent un lien étroit avec la demande initiale.
Colt précise qu'afin de respecter le principe du contradictoire le questionnaire doit intégrer la consultation publique sur la méthode d'évaluation des coûts pour l'offre « bitstream » puisque cette consultation publique est importante au regard des demandes formulées dans le présent règlement de différend.
1. Sur la procédure
1.1. Sur l'argument selon lequel les conditions de Turbo DSL ne peuvent faire l'objet d'un règlement de différend
Colt rappelle que France Télécom considère qu'une prestation de détail soumise à une procédure d'homologation tarifaire ne peut constituer une prestation d'accès soumise aux articles L. 34-8 et L. 36-8 du CPCE.
Colt indique à cet égard d'une part que dans sa décision no 2001-1112 l'Autorité a déjà qualifié de convention d'accès une convention conclue entre un opérateur alternatif et France Télécom relative à une prestation qui est par ailleurs soumise à homologation tarifaire au titre de l'ancien article L. 36-7 du code et de l'article 17 du cahier des charges de France Télécom, et d'autre part que dans sa décision no 2001-253 l'Autorité a qualifié la convention ADSL Connect ATM de convention d'accès au sens de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, alors que France Télécom soutenait qu'il s'agissait d'une offre commerciale.
Colt rappelle que le Conseil d'Etat a reconnu au ministre la possibilité de fixer dans le cadre d'un règlement de différend le prix d'une prestation par ailleurs soumise à une procédure d'homologation.
Colt indique qu'il fallait dans cette affaire, selon le commissaire du Gouvernement, distinguer le pouvoir de fixer réglementairement les tarifs généraux de France Télécom de celui d'adopter une décision individuelle relative à l'accès, ces deux pouvoirs pouvant coexister.
Colt précise qu'aux termes de la loi du 26 juillet 1996 le ministre chargé des télécommunications, après avis de l'Autorité, se prononce sur les tarifs de détail pour les services pour lesquels il n'existait pas de concurrent sur le marché, et qu'un service peut à la fois être un service de détail soumis à homologation tarifaire et, lorsqu'il est utilisé par un opérateur, un service d'accès soumis aux articles L. 34-8 et L. 36-8 de l'ancien code. Colt rappelle que l'Autorité a confirmé cette approche dans la décision no 2002-147. Colt indique qu'à la suite de l'entrée en vigueur de la décision no 2005-0280 la procédure d'homologation tarifaire n'existe plus et par conséquent la question de la coexistence de cette procédure et de la procédure de règlement de différend ne se pose plus pour la période postérieure au 22 juin 2005, date de la publication de la décision au Journal officiel.
1.2. Sur l'argument selon lequel Turbo DSL est une liaison louée
Colt note qu'à compter des décisions no 2001-253 et no 2003-27 la qualification juridique de l'accès large bande ne soulève plus de difficulté et qu'il s'agit bien d'une offre d'accès soumise au régime des articles L. 34-8 et L. 36-8 et non d'une liaison louée comme France Télécom le soutient.
Colt indique que dans la décision no 2005-0280 l'Autorité a exigé le maintien de l'offre Turbo DSL dans son utilisation opérateurs au titre des obligations pesant sur France Télécom pour le marché de gros de l'accès large bande livrée au niveau régional et qu'ainsi, sous le nouveau cadre comme sous l'ancien, il s'agit bien d'une prestation d'accès et non d'une offre de liaisons louées. Colt ajoute que, même s'il s'agissait d'une liaison louée d'opérateur, les prix devraient également obéir au principe d'orientation vers les coûts et l'Autorité serait compétente pour régler le litige au titre de l'article L. 36-8 du CPCE.
1.3. Sur la prétendue impossibilité de contester l'offre DSL Entreprises au motif qu'elle aurait été approuvée par l'Autorité
Colt considère que France Télécom tente de démontrer que l'Autorité aurait approuvé l'offre DSL Entreprises et que Colt ne peut donc en contester l'approbation implicite.
Colt considère qu'il ne fait pas de doute que, dans son communiqué de presse, l'Autorité considère que la publication de l'offre a été faite conformément aux obligations découlant de la décision no 2005-0280, et que cette position ne peut être sérieusement interprétée comme indiquant que le contenu de l'offre est conforme.
Colt rappelle que de toute manière l'Autorité peut, au titre de l'article D. 307-II du CPCE, imposer à tout moment des modifications à une offre technique et tarifaire d'interconnexion ou d'accès afin de mettre l'offre technique et tarifaire en conformité avec les dispositions de présent code ou de donner effet aux obligations qui en résultent.
1.4. Sur la prétendue impossibilité pour l'Autorité de prendre des mesures rétroactives
Colt rappelle que France Télécom considère que l'Autorité ne peut fixer les conditions financières de la prestation d'accès pour la période antérieure à la date de la décision sans enfreindre la règle selon laquelle les règlements ne disposent que pour l'avenir.
Colt indique que l'Autorité a par plusieurs décisions fixé des tarifs s'appliquant rétroactivement et que ce pouvoir a été confirmé à l'Autorité par la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 20 janvier 2004.
Colt précise que la décision no 2002-147 n'est pas transposable au cas présent, puisque, dans le présent différend, il existe une continuité parfaite entre les prestations Turbo DSL fournies à Colt depuis le 1er janvier 2005 et les prestations que France Télécom doit continuer à fournir en application de la décision no 2005-0280, alors que, dans la décision no 2002-147, les prestations étaient de nature différente.
Colt indique que l'Autorité fait rétroagir ses décisions au début de la période litigieuse surtout lorsque le début de cette période se situe dans la même année fiscale que la date de la décision et qu'en conséquence rien ne s'oppose à ce que la décision de l'Autorité remonte ses effets au 1er janvier 2005, date à partir de laquelle le désaccord a persisté sur le niveau des tarifs de la prestation.
1.5. Sur la prétendue absence d'échec des négociations
Colt rappelle que la compétence de l'Autorité en matière de règlement de différend a été étendue par la loi du 9 juillet 2004 et qu'elle peut désormais être saisie :
- en cas de refus d'accès ou d'interconnexion ;
- en cas d'échec des négociations ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'accès ou d'interconnexion ;
- en cas d'échec des négociations commerciales relatives à la mise en oeuvre des obligations des opérateurs prévues par le titre Ier du livre II du CPCE.
Colt précise que si en l'espèce il n'y a pas refus d'accès ou d'interconnexion, il y a :
- échec des négociations sur l'exécution d'une convention d'accès ;
- désaccord sur l'exécution de cette convention ;
- échec des négociations commerciales relatives à la mise en oeuvre des obligations de France Télécom au titre des nouvelles obligations découlant de la décision de l'Autorité no 2005-0280.
Colt précise qu'elle continue à négocier avec France Télécom mais pas sur les prestations objet du différend, et que France Télécom n'entend pas, dans son courrier du 10 août 2005, donner de suite favorable aux demandes de Colt consistant à modifier des tarifs qu'elle a déterminés sur la base de ses obligations réglementaires et qu'en conséquence l'échec des négociations et/ou le désaccord des parties est patent et incontestable.
1.6. Sur la prétendue compétence du Conseil de la concurrence
Colt rappelle que France Télécom soutient que Colt aurait du saisir le Conseil de la concurrence, compte tenu de l'incompétence de l'Autorité pour juger des affaires relevant du droit de la concurrence.
Colt précise sur ce point que l'Autorité, dans le cadre d'un règlement de différend, peut prendre en compte les conditions de concurrence, notamment dans le but de favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur, et que le Conseil constitutionnel a reconnu à l'Autorité la possibilité, dans son rôle d'arbitre, de considérer des faits qui relèvent également du droit de la concurrence.
Colt rappelle que l'objet de sa saisine n'est pas de faire constater un abus de position dominante mais d'éclairer l'Autorité sur la nécessité d'aménager les conditions financières de la convention d'accès relatives à Turbo DSL et ensuite à DSL Entreprises afin de favoriser une concurrence durable sur le marché du haut débit professionnel.
Colt indique que, dans le présent règlement de différend, l'Autorité doit, d'une part, s'appuyer sur l'obligation d'orientation vers les coûts qui découle de l'article L. 34-8 de l'ancien code et de sa décision no 2005-0280 et, d'autre part, s'appuyer sur les principes de l'article 8 de la directive 2002/21 et de l'article L. 32-1-II du CPCE. Ces principes comprenant notamment :
- l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseaux et les fournisseurs de services de télécommunications ;
- le développement de l'emploi de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications.
2. Réponses aux objections de France Télécom sur le fond
2.1. Sur l'argument selon lequel Turbo DSL serait bien adaptée aux besoins du marché
Colt estime que l'affirmation de France Télécom selon laquelle l'offre Turbo DSL serait parfaitement adaptée aux besoins des opérateurs est inexacte. Colt note que cette offre est une prestation d'accès, au même titre que la prestation ACO, qui devrait en particulier être orientée vers les coûts. Colt fait notamment référence à la décision Liberty Surf no 2001-253 qui établit qu'une prestation d'accès haut débit constitue une prestation d'accès sur le plan juridique.
Colt considère que de l'aveu même de France Télécom l'offre Turbo DSL n'est pas orientée vers les coûts. Colt indique ainsi être en désaccord avec France Télécom sur les tarifs de cette offre depuis janvier 2005 et, bien qu'ayant réglé les factures contestées, Colt constate qu'aucun accord sur les prix contractuels n'est intervenu depuis cette date.
Colt souligne, par ailleurs, que l'augmentation du nombre de liaisons ne constitue pas la preuve que cette offre est adaptée au marché dans la mesure où 76 % des liaisons sont achetées par Transpac/Oléane, « qui ne peuvent qu'être satisfaites par le niveau tarifaire demandé par leur maison mère ».
Concernant l'argument de France Télécom selon lequel les tarifs T2 et T3 particulièrement importants pour un opérateur tel que Colt sont ceux pour lesquels la baisse a été particulièrement importante, Colt souligne qu'elle se fournit essentiellement en liaison T0 et T1 soit directement auprès de France Télécom soit auprès de Cegetel, qui revend ces liaisons courte distance avec une prestation de transport.
Colt considère que France Télécom fait l'aveu de la non-orientation vers les coûts de Turbo DSL en précisant, à propos du mélange de tarifs Turbo DSL et DSL Entreprises dans les comparaisons effectuées par Colt : « La comparaison mélange ainsi des composants tarifés à partir d'une offre de référence orientée vers les coûts, avec d'autres éléments relevant d'une offre commerciale de détail satisfaisant à d'autres critères ».
Colt indique, par ailleurs, que, conformément à l'article D. 311 du CPCE, elle propose de payer un tarif égal à 25 % du tarif demandé par France Télécom, en s'appuyant sur des comparaisons avec les offres ACO, Broba II et CE2O.
Colt note qu'il découle de ces différences une surfacturation de 200 000 euros par mois, impliquant au total que depuis le 1er janvier elle aurait été surfacturée pour un montant de 2 000 000 d'euros.
2.2. Sur l'argument selon lequel les différences de prix de l'offre DSL Entreprises par rapport à l'offre DSL Access seraient justifiées par des différences de coûts
Colt rappelle tout d'abord que dans le cadre de la décision no 2005-0280, France Télécom est soumise à certaines obligations, et notamment celles relatives à l'orientation vers les coûts et à la non-discrimination.
Colt indique également, qu'à plusieurs reprises, l'Autorité avait indiqué dans ses décisions n°s 2003-1298, 2004-373, 2004-615 et 2004-794 que les coûts de production d'un accès sont indépendants des débits. Colt souligne que les prix élevés des redevances mensuelles des accès DSL Entreprises ne peuvent être expliqués, comme le fait France Télécom, par des coûts élevés de mise en service, dans la mesure où ces coûts « sont (ou devraient être !) pris en compte dans les frais d'accès au service », six fois plus élevés que ceux de DSL Access.
Colt considère que l'effectif dédié de 30 personnes (soit 19 de plus que pour ACO et IP-ADSL) travaillant à la gestion des signalisations de Turbo DSL/DSL Entreprises n'impliquerait qu'un surcoût maximal de 2,92 euros par mois et par accès si, d'une part, France Télécom allouait l'ensemble de ces coûts à la seule prestation d'accès et si, d'autre part, ces personnels étaient spécifiques aux seuls parcs des opérateurs alternatifs. En retenant l'ensemble du parc Turbo DSL, Colt estime que ce coût ne serait plus que de 0,69 euro par mois et par accès. Colt indique que France Télécom ne peut justifier ainsi de la différence de 50 euros par mois et par accès.
Colt indique également avoir déjà pris en compte dans ces précédentes écritures le fait qu'à la différence de l'offre ACO l'offre Turbo DSL implique que l'ensemble des fréquences de la paire de cuivre est mobilisé, ce qui engendre un surcoût de 6,6 euros par mois.
Colt observe que l'argument de France Télécom, selon lequel les cartes SDSL sont plus coûteuses (Colt cite le chiffre de 965 euros pour une carte SDSL 24 ports) que les cartes ADSL, n'est pas pertinent dans la mesure où cette différence est déjà reflétée par les prix respectifs des accès ADSL et SDSL de 10 euros par mois. Colt indique que si l'on considère des cartes occupées à 71,1 %, l'écart de coût entre les cartes ADSL et SDSL ne serait que de 1 euro par mois et par accès et non de 10 euros comme les tarifs de l'offre l'indiquent.
Colt considère également, conformément à une position commune du GRE (ERG Common Position, Bitstream Access ERG (03)33 rev 1, p. 4.) et à la décision no 2001-253 de l'Autorité, que les coûts relatifs aux liens inter-DSLAM et aux liens DSLAM-brasseurs devraient être pris en compte dans la prestation de collecte et non dans la prestation d'accès.
Enfin, Colt considère, d'une part, qu'il appartient à France Télécom de faire la démonstration selon laquelle le tarif de ses offres reflètent effectivement les coûts, conformément à l'article D. 311 du CPCE, et que France Télécom n'est pas en mesure de la faire et, d'autre part, que, par ses écritures, France Télécom confirme le bien-fondé de l'approche de Colt consistant à se fonder sur les tarifs de l'accès de l'offre DSL Access en y ajoutant les coûts relatifs à l'utilisation de la paire de cuivre et à ceux d'une carte SDSL.
2.3. Sur l'argument selon lequel la comparaison avec Broba II serait trompeuse
Colt note que, selon France Télécom, la comparaison tarifaire effectuée par Colt avec l'offre Broba II relève de « nombreuses contrevérités ».
Colt souligne que cette comparaison est simple : elle simule les coûts que Colt aurait à supporter si ses liaisons Turbo DSL étaient tarifées selon l'offre Broba II. Cette comparaison utilise à la fois les tarifs de l'offre mais également les factures reçues par Colt en Belgique pour cette prestation. Colt indique que la feuille de calcul Excel constituant cette comparaison est fournie en annexe.
Colt souhaite revenir sur plusieurs arguments avancés par France Télécom. Colt indique tout d'abord avoir modifié ses calculs pour prendre en compte des portes non colocalisées. L'opérateur indique également que la comparaison faite par France Télécom ne prend pas en compte le segment de l'accès et que dans sa propre comparaison Colt ne prend pas en compte de GTR.
Enfin, sur l'argument de France Télécom selon lequel la comparaison de Colt est faussée par l'intégration de tarifs T3 de Turbo DSL qui est une « offre commerciale de détail », Colt indique que c'est précisément parce que cette offre est « surtarifée » qu'elle a déposé le présent règlement de différend.
Colt souligne que France Télécom ne fait aucune tentative pour justifier le prix mensuel des portes colocalisées alors que, conformément à l'article D. 311 du CPCE, cette démonstration lui incombe.
Colt observe que le tarif de 92 euros par mois, fixé pour les portes colocalisées en Belgique, n'est, selon toute probabilité pas inférieur aux coûts encourus par l'opérateur historique belge. Colt indique qu'étant donné que France Télécom et Belgacom s'appuient sur des équipements réseau similaires, souvent fournis par le même équipementier, les coûts de France Télécom ne devraient pas être différents.
Sur le tarif des portes, Colt indique enfin que le prix de 888 euros par mois n'a pas évolué depuis 2003 et qu'il a été déterminé sur la base de prix d'équipements de 2002. Colt précise que, depuis, le prix des équipements ATM à baissé d'au moins 50 % et que dans le même temps leur taux de remplissage a augmenté de 400 %. Ces seules constatations devraient impliquer une baisse du tarif des portes. Par ailleurs, Colt note que ce tarif est contraire à la décision no 2005-0280 de l'Autorité dans la mesure où il crée un effet de seuil. Colt souligne qu'un minimum de 70 liaisons par porte dans un horizon de 12 mois est nécessaire pour rentabiliser cet investissement, ce qui constitue une importante barrière à l'entrée.
De ce fait, Colt indique que bien qu'étant plus efficace dans les grandes villes où elle est présente, elle peut être évincée du marché parce qu'elle ne bénéficie pas de conditions économiques viables dans les villes moyennes et au-delà.
2.4. Sur l'argument selon lequel le marché de détail serait concurrentiel
Colt considère que le marché n'est pas concurrentiel. Elle indique tout d'abord que, selon la consultation publique de juin 2004 sur les marchés du haut débit, Transpac détenait 70 % à 75 % des liens DSL professionnels en 2003.
Colt rappelle avoir investi plus que tout autre opérateur alternatif en infrastructures par rapport à son chiffre d'affaires, en honorant toujours ses dettes, sans faire appel à des garanties d'état et en étant l'un des premiers à dégrouper en France. Contrairement aux critiques formulées par France Télécom, la stratégie de Colt est conforme selon elle aux objectifs de la décision no 2005-0280 de l'Autorité pour le développement d'une concurrence durable sur le haut débit professionnel.
Colt admet que Cegetel a pu contribuer à la guerre des prix sur le marché de détail, mais que son influence reste très faible par rapport à Oléane sur ce marché.
L'opérateur constate également que ses concurrents n'ont pu attaquer ce marché qu'au prix d'une guerre des prix insoutenable. Colt retrace alors les difficultés financières de quelques opérateurs français et indique en contrepoint que son passif est demeuré sain, malgré des investissements substantiels.
Colt indique ensuite que l'augmentation de son chiffre d'affaires traduit plusieurs évolutions de sens contradictoires. Colt souligne que l'évolution de son chiffre d'affaires, restreint au périmètre de ses propres accès (fibres optiques ou dégroupage), est plus satisfaisante que cette évolution générale, alors que sur le périmètre des liens France Télécom, celui-ci est en baisse (Turbo DSL et Transfix). L'opérateur indique par ailleurs que ces évolutions sont à mettre en regard d'une baisse de 27 % des prix sur le marché de détail, au cours des neufs derniers mois.
Colt indique enfin que, compte tenu de l'importance grandissante des prestations de IP-VPN, aux yeux des entreprises, même de taille moyenne, Colt sera exclue du marché des sites distants et donc du marché des IP-VPN, sans une prestation « bitstream » orientée vers les coûts et qui ne serait pas marquée par des effets de seuil ;
Vu les nouvelles observations en défense enregistrées le 4 novembre 2005 présentées par la société France Télécom ;
Dans ses nouvelles observations, France Télécom indique que les nouvelles demandes formulées par Colt dans ses observations enregistrées le 14 octobre 2005 ne constituent pas des demandes additionnelles au sens de la décision no 2000-489 de l'Autorité et mettent en évidence l'absence de fondement des demandes initiales.
France Télécom indique que la modification de l'offre DSL Entreprises au 22 juin 2005 n'est pas pertinente puisque l'offre n'existait pas à la date considérée et que par ailleurs Colt en demandant l'intégration de la consultation publique dans la procédure du règlement de différend cherche à peser sur le résultat de la consultation.
France Télécom rappelle que dans le litige ayant opposé France Télécom à Iliad en 2003, l'Autorité avait transmis aux parties une décision définitive afin de recueillir leur avis. France Télécom précise qu'il ne s'agit pas pour les parties d'avoir de la visibilité sur leur intervention réciproque dans le cadre d'une consultation publique.
France Télécom considère que les textes n'organisent nullement le caractère contradictoire des réponses des opérateurs à la consultation publique de l'Autorité et que Colt cherche à avoir ainsi connaissance des informations qui seront transmises à l'Autorité par France Télécom.
1. Il ne saurait être fait droit aux demandes de Colt au regard de l'irrecevabilité de la saisine
1.1. Les conditions tarifaires de l'offre Turbo DSL ne sauraient relever du présent règlement de différend
L'homologation du tarif fait obstacle à la compétence de l'Autorité
en matière de règlement de différend
France Télécom souligne que les dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE qui encadrent la procédure de règlement de différend conduisent l'Autorité à définir les conditions techniques et tarifaires de l'accès ou de l'interconnexion entre les seuls opérateurs parties au litige.
France Télécom rappelle que l'ordonnancement de la procédure de règlement de différend s'inscrit dans le respect des dispositions législatives et réglementaires et que par conséquent l'Autorité ne peut prendre une décision qui méconnaisse les compétences qui ont été confiées à une autre autorité par les textes.
France Télécom rappelle que si en principe une décision de règlement de différend définit en théorie les conditions équitables tarifaires et techniques entre deux opérateurs eu égard aux conditions particulières du litige, une telle décision peut avoir des effets normatifs indirects pour le secteur puisque les solutions dégagées font l'objet d'une application non discriminatoire. France Télécom précise qu'une décision qui viendrait modifier le tarif de Turbo DSL entre Colt et France Télécom aurait un effet normatif direct et aurait pour conséquence de revenir sur le tarif homologué en application de la réglementation et de la loi applicable.
France Télécom souligne que la procédure d'homologation applicable à Turbo DSL résulte de l'application directe des textes en vigueur, et notamment de l'article L. 36-7 de l'ancien code des postes et télécommunications et de l'article 17 du cahier des charges de France Télécom, dont l'article 133 de la loi du 9 juillet 2004 a prorogé l'applicabilité.
France Télécom rappelle que dans ses publications et ses décisions no 2001-1055 et no 2001-1112, l'Autorité a décidé implicitement ou explicitement que, dès lors que la loi avait établi la compétence du ministre en matière d'homologation, sa propre compétence s'effaçait au profit de celui-ci, y compris dans le cadre d'un règlement de différend.
La pratique décisionnelle de l'Autorité démontre que l'analyse de Colt sur la nature de la prestation ne saurait conduire à remettre en cause la tarif homologué
France Télécom rappelle que les prestations Turbo DSL et IP-ADSL diffèrent de la prestation ACO puisque cette dernière n'est pas soumise à la procédure de l'homologation tarifaire et que par conséquent Colt ne peut fonder sa demande de révision des tarifs de l'offre Turbo DSL sur la décision no 2003-27 qui ne vise que la prestation ADSL Connect ATM.
France Télécom indique que les décisions de règlements no 2001-1112, no 2004-375 et no 2004-376 citées par Colt démontrent de toute évidence que l'Autorité n'a jamais remis en cause les dispositions tarifaires ayant fait l'objet d'un contrôle ex ante au travers des modalités d'homologation, et précise que l'Autorité n'a reconnu la recevabilité des demandes que dans la mesure où elles portaient sur des offres qui n'ont vocation qu'à adresser les opérateurs et non le marché final. France Télécom considère donc que la recevabilité d'une demande qui porte sur l'offre Turbo DSL, qui est assimilable à l'analyse qu'a faite l'Autorité de l'offre de détail Transfix, doit être écartée.
1.2. Colt détourne la procédure de règlement aux fins de la modification
d'une offre adressant l'ensemble du marché
L'offre DSL Entreprises n'a pas encouru de critique lors de sa publication
France Télécom constate que l'Autorité a pris acte de la publication de la première version de l'offre de référence et qu'elle a considéré que la publication de cette offre ne soulevait pas de critique au regard des obligations auxquelles elle est soumise.
France Télécom indique que si l'Autorité a, dans sa conférence de presse du 30 septembre 2005, souligné la baisse des tarifs de l'offre DSL Entreprises par rapport à l'offre Turbo DSL, elle ne considère pas que l'offre ait fait l'objet d'une approbation formelle puisqu'un tel formalisme n'est pas requis par les textes. France Télécom précise que, loin d'avoir soulevé les critiques de l'Autorité, son offre bénéficie d'un accueil qui dément au cas d'espèce de l'offre DSL Entreprises les prétentions de Colt.
France Télécom rappelle que l'article D. 307 du CPCE permet à l'Autorité d'imposer des modifications de l'offre mais que, dans ce cas, les modifications sont applicables, non pas à deux opérateurs dans le cadre d'un différend mais à l'ensemble des opérateurs.
France Télécom précise que si Colt avait voulu faire constater le non-respect de ses obligations par France Télécom, il lui appartenait de saisir l'Autorité afin qu'elle prenne acte d'un tel manquement.
Colt est mal fondée à réclamer la révision de l'offre DSL Entreprises au 22 juin 2005
France Télécom considère qu'en se référant à l'article D. 307 du CPCE Colt cherche à obtenir une évolution de l'offre adressant l'ensemble du marché.
France Télécom note que Colt demande à l'Autorité de modifier les conditions techniques et tarifaires d'une offre à une échéance antérieure à celle que le régulateur a lui-même reconnu comme étant la date répondant aux obligations réglementaires auxquelles France Télécom est soumise.
France Télécom rappelle les dispositions de l'article 12 de la décision no 2005-0280 prévoient que « s'agissant de la publication d'une offre de référence conforme à ces obligations, France Télécom devra publier cette offre au plus tard un mois à compter de cette notification » et qu'en conséquence Colt ne peut réclamer la modification de conditions techniques et tarifaires dont la publication devait, selon les dispositions arrêtées par l'Autorité, intervenir un mois après la publication au Journal officiel en prenant pour date de prise d'effet des modifications cette première date de publication au Journal officiel.
France Télécom considère que la solution visant à modifier l'offre de référence avant sa première publication serait contraire aux dispositions de l'article D. 307 du CPCE et aux dispositions de la décision no 2005-0280 qui ne prévoyait pas d'opposabilité de nouvelles obligations règlementaires en la matière au 22 juin 2005.
1.3. Colt ne peut prétendre à un quelconque échec des négociations
Colt n'apporte aucun élément matériel à l'appui du constat de l'échec des négociations
Sur l'échec des négociations sur l'exécution de la convention Turbo DSL
France Télécom note que Colt prétend qu'il y a échec des négociations sur l'exécution de la convention d'accès Turbo DSL et considère que ce n'est pas le cas car pour France Télécom les seules prétentions de Colt portent sur le tarif qui n'est que l'application des tarifs homologués par le ministre.
France Télécom rappelle que les tarifs n'ont jamais fait l'objet sur le plan contractuel d'une contestation formelle et que Colt a toujours assuré le paiement régulier des prestations, assortissant ce paiement de réserves.
Sur le désaccord portant sur l'exécution de la convention Turbo DSL
France Télécom souligne que l'ensemble de la correspondance entre les parties démontre que le désaccord n'a jamais été matérialisé sur le plan contractuel et est resté purement rhétorique, et ne saurait donc représenter une base sérieuse en la matière. France Télécom rappelle que Colt n'a à aucun moment suspendu le paiement de la partie contestée de la prestation comme les dispositions contractuelles le lui permettent.
Sur l'échec des négociations relatif à la mise en oeuvre des obligations de France Télécom
France Télécom rappelle que le désaccord dont l'Autorité peut être saisie au titre d'un règlement de différend porte par nature, en application de l'article L. 36-8 du CPCE, « sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de communications électroniques », et non sur la mise en oeuvre d'obligations réglementaires dont la méconnaissance est sanctionnable au titre de l'article L. 36-11 du CPCE.
France Télécom souligne que concernant les prestations Turbo DSL Colt n'a émis que des réserves tout en payant l'intégralité des factures, et que concernant l'offre DSL Entreprises Colt n'a jamais cessé de poursuivre les négociations et a maintenu un dialogue continu sur les conditions techniques et tarifaires des prestations en litige selon elle.
France Télécom est en mesure de démontrer que Colt continue
de négocier avec elle sur les prestations prétendument en litige
France Télécom rappelle, comme le mentionnent ses précédentes écritures, que Colt ne peut prétendre à un échec des négociations puisque France Télécom n'a jamais opposé de fin de non-recevoir à ses demandes, et qu'au contraire elle a pris toutes les dispositions pour étudier au mieux les besoins de Colt.
France Télécom indique que Colt continue à étudier les propositions de France Télécom et fournit les éléments permettant d'apprécier certaines propositions de France Télécom, mais surtout que Colt confirme qu'elle n'a pas étudié les propositions de France Télécom préalablement à la saisine de l'Autorité et qu'elle continue très clairement à négocier les conditions de l'offre DSL Entreprises comme le démontre le contenu du message électronique du 30 septembre 2005.
France Télécom considère donc que l'échec des négociations ne peut être retenu et donc que l'Autorité doit déclarer les demandes de Colt irrecevables.
1.4. L'Autorité ne peut modifier le tarif de l'offre Turbo DSL
sans porter atteinte aux principes généraux du droit
France Télécom rappelle que Colt demande la révision des tarifs de l'offre Turbo DSL à compter du 1er janvier 2005 et que l'Autorité ne peut modifier rétroactivement ces tarifs en raison de la décision d'homologation de la DIGITIP, puisque cela reviendrait à empiéter pour le passé sur une compétence qui n'était pas la sienne et que cela constituerait un retrait d'une décision administrative individuelle qui n'a donné lieu à aucune contestation dans les délais légaux et qui ne peut, aux termes d'une jurisprudence constante, faire l'objet d'une révision rétroactive.
France Télécom indique que Colt ne peut invoquer la décision de l'Autorité no 2003-703, confirmée par la cour d'appel de Paris puisque la situation est totalement différente : la décision de l'Autorité n'est pas venue remettre en cause des tarifs homologués et il y avait en l'espèce indétermination du prix et échec des négociations sur le prix de la terminaison d'appel du réseau d'UPC.
France Télécom souligne que les conditions générales de l'offre relative à Turbo DSL prévoient explicitement qu'en cas de réclamation l'obligation de paiement de la somme objet du litige est suspendue, sous réserve du paiement de la partie non contestée de la facture, et que Colt a payé de façon systématique la totalité des factures et ne les a jamais contestées dans les formes prévues par le contrat ni saisi l'Autorité sur la base d'un éventuel rejet des contestations.
France Télécom rappelle que Colt a souscrit librement au contrat Turbo DSL et ainsi donné son accord sur les prix et qu'en application des alinéas 1 et 2 de l'article 1134 du code civil Colt ne saurait prétendre modifier unilatéralement les tarifs convenus et acceptés librement lors de la conclusion du contrat sans remettre en cause cette règle fondamentale.
France Télécom considère que Colt ne saurait se prévaloir de contestations de pure forme pour que soit imposée rétroactivement l'application de tarifs plus favorables alors qu'ils ont bien été contractualisés.
2. Sur l'absence de justifications techniques et économiques à l'évolution
de la tarification de DSL Entreprises
2.1. L'offre Turbo DSL est adaptée aux besoins des opérateurs
France Télécom conteste l'argumentation de Colt visant à démontrer que l'offre Turbo DSL devait satisfaire à une obligation d'orientation vers les coûts du fait de l'ancien code des postes et télécommunications.
France Télécom fait référence aux dispositions transitoires de la loi du 9 juillet 2004 no 2004-669, et notamment son article 133 qui dispose que les obligations imposées sous l'ancien cadre restent applicables jusqu'à ce que l'Autorité mette en oeuvre les nouvelles compétences qui lui sont attribuées. Le même article organise également la continuité du dispositif de contrôle tarifaire imposé sur le marché de détail jusqu'à ce que les analyses de marché soient menées à bien.
France Télécom en conclut donc que la compétence particulière du ministre pour le contrôle des tarifs de Turbo DSL était maintenue in fine, cette offre ne pouvant donc faire l'objet d'une régulation. France Télécom réfute donc tout aveu fait sur le non-respect de ses obligations réglementaires, contrairement aux affirmations de Colt.
France Télécom souligne que Colt ne tient pas compte de la responsabilité de l'Autorité qui a pourtant émis des avis publics sur les tarifs de Turbo DSL jusqu'en mai 2005, indiquant ainsi qu'elle avait parfaite connaissance de ces tarifs. Si l'obligation d'orientation vers les coûts avait été effective, France Télécom suppose que l'Autorité serait intervenue.
Par ailleurs, France Télécom rappelle l'essor continu de Turbo DSL depuis sa création, notamment sur le marché des opérateurs qui constitue 95 % de son marché global. La croissance du parc a été supérieure sur le parc hors Transpac par rapport au parc global : + 73 % (respectivement 47 %) sur le parc global contre + 78 % (respectivement 52 %) sur le parc hors Transpac de mi-2003 à mi-2004 (respectivement de mi-2004 à mi-2005).
De plus, France Télécom précise que si Colt a réduit pour des raisons propres son parc de liaisons Turbo DSL, le parc Turbo DSL hors Transpac a en revanche été multiplié par 3,6 entre janvier 2003 et août 2005.
France Télécom reconnaît que le marché des liaisons T2 et T3 est ouvert à la concurrence et permet à d'autres opérateurs de vendre à plusieurs clients (dont Colt) de telles liaisons à partir de leurs infrastructures propres ou sur la base d'une collecte aux niveaux T0 et T1.
France Télécom indique qu'il serait erroné de dire que les baisses sur les tarifs T2 et T3 favorisent Transpac : les tarifs T2 (respectivement T3) ne concernent que 3,6 % (respectivement 0,64 %) du parc de Transpac contre 19,74 % (respectivement 11,67 %) pour l'ensemble des opérateurs tiers.
2.2. Sur les différences de prix et de coûts entre DSL Entreprises et DSL Access
France Télécom apporte les précisions suivantes suite aux affirmations de Colt concernant la répartition entre les frais d'accès au service (FAS) et l'abonnement mensuel pour la composante accès de l'offre DSL Entreprises, par rapport à DSL Access :
- les FAS de 300 euros de DSL Entreprises sont amortis sur 36 mois et s'accompagnent d'un abonnement mensuel de 66 euros (86 % des accès sont en ADSL et 14 % en SDSL) ;
- les FAS de DSL Access sont de 53 euros amortis sur 72 mois et s'accompagnent d'un abonnement mensuel de 14,2 euros.
En incluant les FAS dans le tarif mensuel, France Télécom obtient ainsi un écart de 15 à 75 euros, dû notamment aux exigences du marché professionnel en termes de qualité de service, de sécurité et de niveau de service, comme France Télécom l'a expliqué dans son précédent mémoire.
France Télécom revient point par point sur les différences entre les deux offres :
Installation et création de VP/VC
Dans le cas de DSL Access, France Télécom explique que la mise en service ne nécessite qu'un jarretiérage et une opération homme-machine pour activer la ligne, sans nécessité de vérifier la disponibilité des paires du fait de l'existence d'un abonnement téléphonique préalable. France Télécom n'a ensuite qu'à activer un canal virtuel dans un conduit virtuel (dit VP) déjà routé, ce qui ne nécessite que de programmer dans le gestionnaire du DSLAM l'activation du circuit et de lui affecter le numéro de VP correspondant. Ces opérations sont effectuées par les techniciens du réseau téléphonique général.
Pour DSL Entreprises, France Télécom indique que ces coûts sont beaucoup plus lourds : ils ne sont pas intégralement recouvrés par le tarif non récurrent compte tenu de la plus faible durée de vie des clients sur le marché professionnel. L'ensemble de ces coûts est évalué par France Télécom à 650 euros, ce qui revient à comptabiliser dans la partie abonnement mensuel 350 euros non pris en compte dans les 300 euros de FAS. [...] avec une durée d'amortissement de 36 mois.
France Télécom ajoute que dans le cas de DSL Entreprises le raccordement du cuivre nécessite généralement l'aboutement de tronçons du NRA au site client en passant par le sous-répartiteur. Il faut de plus ajouter l'installation du modem client dans le cas d'une interface ethernet (ou d'un modem d'essai temporaire dans le cas d'une interface cuivre) et la réalisation de tests en collaboration avec un technicien qui supervise du central. La mise en service d'un accès nécessite donc le déplacement d'au moins un technicien.
Création de VC de bout en bout
France Télécom précise que, contrairement à DSL Access, ce sont des VC et non des VP qui sont gérés individuellement de bout en bout dans DSL Entreprises. Ceci demande de réaliser plusieurs opérations sur le réseau ATM (définition d'une règle d'ingénierie et recherche du chemin ATM emprunté par le VC, programmation dans chaque équipement du chemin de routage du VC, tests de bout en bout pour vérification du bon fonctionnement du circuit). France Télécom s'engage sur des délais de production de 14 jours maximum. [...]
Paire de cuivre
France Télécom indique que contrairement à DSL Access où il ne faut compter que les 2,9 euros par mois liés à l'accès partagé avec prestation de filtrage incluse, il faut compter pour DSL Entreprises un tarif mensuel de 9,5 euros de dégroupage total hors FAS de dégroupage, auquel s'applique un coefficient de 1,03 pour le multipaires, qui selon France Télécom a vocation à atteindre 20 % fin 2006.
Coûts de DSLAM
France Télécom indique que le secteur professionnel est pénalisé par le taux d'équipement effectif de ses DSLAM, notamment en SDSL, ce qui conduit à un facteur 3,7 entre le coût moyen du DSLAM sur DSL Entreprises par rapport à DSL Access. Ce taux devrait néanmoins augmenter, jouant à l'inverse de la progression du multipaires.
France Télécom souligne que les coûts complets des DSLAM SDSL représentent 8 % des coûts complets des DSLAM ADSL, alors qu'ils ne représentent que 0,42 % du parc de lignes ADSL.
France Télécom précise que l'écart de [...] par mois par ligne sur les liens inter-DSLAM entre DSL Access et DSL Entreprises s'avère marginal.
Exploitation, supervision, maintenance et GTR
France Télécom considère que les coûts correspondants sont nettement plus élevés sur DSL Entreprises que sur DSL Access du fait notamment de l'exploitation et la supervision des VC individuels, en permanence, de bout en bout. Il n'y a de plus aucun engagement de GTR sur DSL Access, alors qu'en DSL Entreprises il faut prendre en compte les coûts de gestion individuelle des VC de bout en bout, des coûts de SI de supervision et autres outils informatiques puissants ainsi que des flux OAM de supervision sur les équipements clients. L'ensemble de ces coûts, quasi intégralement affectés à l'accès DSL Entreprises, crée un écart de [...] et par accès avec DSL Access.
Coûts commerciaux
France Télécom indique qu'ils sont également plus élevés dans DSL Entreprises car il faut prendre en compte le traitement des commandes, le pilotage de construction Turbo DSL ou DSL Entreprises, ainsi que l'accueil des signalisations et le pilotage d'intervention au CSC (centre support clients entreprises), qui accueille les clients et les informe du suivi et du rétablissement des dérangements. France Télécom fait part également de cycles de ventes plus longs, qui alourdissent les coûts commerciaux. L'ensemble de ces coûts induit un écart de [...] et par accès entre DSL Access et DSL Entreprises.
Coûts spécifiques
France Télécom mentionne un écart pour les coûts de recherche et développement et de système d'information de [...] et par accès pour DSL Entreprises par rapport à DSL Access.
2.3. Sur la comparaison avec Broba II
France Télécom s'étonne que Colt ne cite que l'exemple de l'offre Broba II en Belgique alors qu'elle est présente dans plus d'une dizaine de pays européens.
France Télécom souligne l'inversion des factures accès et portes entre les deux mémoires de Colt et émet des doutes sur la robustesse de cette analyse. France Télécom note que le pourcentage de baisse mis en avant dans le tableau de Colt est sensiblement inférieur à celui du premier mémoire.
France Télécom maintient sa comparaison des tarifs Broba II et DSL Entreprises telle qu'elle l'avait présentée dans son premier mémoire.
France Télécom ajoute que les situations comparées par Colt ne sont pas équivalentes : en France, Colt a notamment la possibilité de recourir à la solution alternative de Cegetel. Typiquement, le tarif T3, acheté en pratique par Colt à Cegetel, devrait être évalué sur la base du prix que paie Colt à Cegetel.
2.4. Sur le caractère concurrentiel des marchés
France Télécom cite Michel Paulin, directeur général de Neuf-Cegetel, qui indique avoir 100 000 sites IP-VPN MPLS, chiffre qu'il estime équivalent à celui de France Télécom.
France Télécom réfute le fait que la chute du chiffre d'affaires de Colt sur les liens d'un débit inférieur à 2 Mbits entre décembre 2004 et septembre 2005 soit liée à des tarifs trop élevés des offres Turbo DSL et Transfix. Il revient en effet de comparer non des niveaux de prix, mais l'évolution des prix de gros. France Télécom rappelle que ces tarifs ont baissé durant toute la période 2001-2005 et fournit des chiffres complémentaires sur l'évolution tarifaire des liaisons asymétriques (constituant 85 % du parc Turbo DSL). France Télécom revient notamment sur l'exemple de la liaison 1cA (respectivement 2cA), qui a baissé de 13 % (respectivement 27 %) entre 2003 et 2005. Le niveau des portes de niveau 1 et 2 a, quant à lui, respectivement baissé de 9 et 17 %.
France Télécom présente également les derniers résultats opérationnels de septembre 2005 de Colt, filiale par filiale, comparés à ceux de septembre 2004. France Télécom note la performance exceptionnelle de la filiale française sur un an et sa contribution non négligeable au redressement des résultats. France Télécom estime donc douteuse la volonté de Colt de vouloir dégager une spécificité française qui prendrait sa source dans la tarification des offres de France Télécom.
Pour l'ensemble de ces motifs, France Télécom demande à l'Autorité de rejeter l'ensemble des demandes de Colt ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 7 novembre 2005, adressée aux parties leur transmettant le questionnaire des rapporteurs et fixant au 21 novembre 2005 la clôture des réponses ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 7 novembre 2005, adressée à France Télécom l'informant d'une visite de site le 16 et le 17 novembre 2005 par les rapporteurs ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 16 novembre 2005 souhaitant le report des visites de site ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 17 novembre 2005, adressée à France Télécom l'informant du report de la visite de site au 21 novembre 2005 ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 18 novembre 2005 souhaitant un délai pour répondre au questionnaire des rapporteurs ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 18 novembre 2005, adressée aux parties fixant au 22 novembre 2005 la clôture des réponses au questionnaire des rapporteurs ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 21 novembre 2005, adressant un second questionnaire aux parties et fixant au 28 novembre 2005 la clôture des réponses ;
Vu les réponses des parties enregistrées le 22 novembre 2005 au premier questionnaire des rapporteurs ;
Vu le courrier de la société Colt enregistré le 24 novembre 2005 transmettant des observations relatives à la réponse de France Télécom au questionnaire des rapporteurs ;
Dans ce courrier, Colt indique que France Télécom fait référence dans ses écritures à ses comptes réglementaires afin d'apporter la preuve de la réalité de certains de ses coûts, « sans toutefois en communiquer une copie, ni même un extrait ».
Pour ce motif, Colt demande au chef du service juridique de l'Autorité de demander à France Télécom de communiquer à Colt, ainsi qu'aux rapporteurs, « une copie de la nomenclature complète des comptes réglementaires de France Télécom ainsi que l'ensemble des notes, explications de méthodologie, règles de valorisation d'actifs et d'amortissement, et clés de répartition nécessaires pour permettre au rapporteur de l'Autorité et à Colt d'apprécier la réalité et le caractère pertinent des coûts alloués à l'activité "TDSL de France Télécom, et plus particulièrement à la partie de l'activité TDSL pertinente pour les opérateurs ».
Colt considère que, sans ces éléments complémentaires, la référence faite par France Télécom à ses comptes réglementaires ne constitue pas un élément de preuve et doit être écartée des débats ;
Vu la lettre de l'adjoint du chef du service juridique, en date du 25 novembre 2005, adressant une question complémentaire des rapporteurs à France Télécom et fixant au 30 novembre 2005 la clôture de la réponse ;
Vu les réponses des parties enregistrées le 28 novembre 2005 au second questionnaire des rapporteurs ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 30 novembre 2005 transmettant des observations en réponse à la lettre de l'adjoint du chef du service juridique, en date du 25 novembre 2005, ainsi que les procès-verbaux définitifs des visites de sites effectuées le 21 novembre 2005 ;
France Télécom souhaite formuler des observations sur les demandes formulées par le rapporteur dans le courrier du 25 novembre 2005.
France Télécom rappelle que cette demande, qui fait suite au courrier de Colt, pourrait remettre en cause l'impartialité de l'instruction en cours. France Télécom observe que le courrier du 25 novembre 2005 reprend intégralement et sans modification la demande de Colt concernant les comptes réglementaires de France Télécom.
Dès lors, France Télécom estime que les conditions de la prise de décision et l'instruction ne permettraient pas de garantir les principes d'équité et de respect des droits de la défense fixés par la Cour européenne des droits de l'homme. France Télécom s'interroge sur la régularité de la décision qui pourrait lui être imposée concernant ses prestations au titre de l'article L. 36-8 du CPCE.
France Télécom indique que sur le plan formel, en confortant la position de Colt, le rapporteur laisse entendre que les informations réclamées par Colt ainsi que leur non-transmission pourraient constituer un élément discréditant des analyses économiques et références de coûts que France Télécom a pu fournir dans le cadre de ses précédentes observations. France Télécom considère que si le rapporteur devait conclure dans un tel sens, la régularité de la procédure pourrait être remise en cause, notamment au regard de la jurisprudence de la cour d'appel et de la Cour de cassation qui se sont prononcées sur des moyens tirés de la violation des garanties procédurales.
France Télécom souligne qu'en suivant la demande de Colt visant à ce que soient produits les documents et justifications liés à ses comptes réglementaires donnant lieu à des opérations complexes d'audit le rapporteur placerait France Télécom dans l'impossibilité d'assurer équitablement sa défense s'il devait tirer argument d'éventuels manquements à cette demande.
France Télécom considère qu'en tout état de cause l'analyse de ses comptes réglementaires se heurte à un double écueil :
- un opérateur tiers ne peut s'ériger en auditeur des comptes de France Télécom ;
- il ne peut y avoir de suspicion sur la sincérité de ses comptes réglementaires. France Télécom estime que le courrier de Colt suppose que le calcul des coûts de revient réglementaires ne se fait pas à l'instigation de celle-ci mais est encadré sur le plan réglementaire.
France Télécom estime qu'en souhaitant écarter du contradictoire la référence aux comptes réglementaires car ils ne sont pas produits Colt commet une erreur méthodologique et met en cause l'Autorité qui participe au processus de déclaration de conformité des comptes.
France Télécom rappelle qu'elle est le seul opérateur sur lequel pèse une obligation réglementaire d'audit des comptes sous l'égide de l'Autorité. France Télécom note qu'il est incontestable que ces comptes constituent une référence dans le cadre du présent litige car ils font l'objet d'une analyse de l'Autorité et d'une publication au Journal officiel attestant de la conformité des coûts entrant dans les comptes individualisés et dans les comptes d'exploitation par produit ou service établis par France Télécom dans le cadre de ses obligations réglementaires. France Télécom souligne que la décision no 2005-0921 de l'Autorité confirme que ses coûts réglementaires ne peuvent être critiqués et ne peuvent être vérifiés en dehors des obligations fixées par les textes. France Télécom précise que, dans le cadre des obligations sectorielles, les comptes ont été audités par un cabinet indépendant choisi par l'Autorité, attestés par les auditeurs et publiés par l'Autorité.
Pour ces motifs, France Télécom considère que la demande de Colt est non fondée. France Télécom souligne qu'il ne lui paraît pas acceptable que ses comptes réglementaires puissent faire l'objet d'une appréciation nouvelle autre que l'audit réglementaire auquel elle est soumise et puissent être remis en cause.
France Télécom demande au rapporteur de considérer que l'envoi de la décision no 2005-0921 et de la description publique du système de comptabilisation publiée par France Télécom justifient la référence aux coûts réglementaires et satisfont aux exigences du contradictoire.
De façon subsidiaire, France Télécom précise que la liste des comptes d'exploitation inclut pour les produits utilisant les DSLAM notamment Extense, les autres produits de détails, IP-ADSL, ACO, Turbo DSL... et pour ce qui est du réseau ATM, outre les produits déjà cités, les produits à base d'ATM destinés aux entreprises (multiLAN, interLAN, ...).
France Télécom souligne que pour les DSLAM les différents types de cartes sont comptabilisés séparément et affectés aux produits qui les utilisent et que les coûts de traversée des brasseurs ATM par les différents produits les utilisant tiennent compte du nombre et du type de brasseurs traversés ;
Vu le courrier de la société Colt enregistré le 2 décembre 2005 transmettant des observations en réponse aux observations susvisées ;
Dans ses observations, Colt indique que les deux documents transmis par France Télécom, à savoir la décision no 2005-0921 de l'Autorité et le document de France Télécom intitulé « Description du système de comptabilisation des coûts répondant aux obligations réglementaires de France Télécom » n'apportent aucun éclairage sur l'établissement par France Télécom de ses affirmations en matière de coûts.
Par ailleurs, Colt estime que les éléments relatifs aux coûts de DSLAM présentés par France Télécom dans sa réponse du 22 novembre 2005 au premier questionnaire des rapporteurs peuvent être corrigés afin de prendre en compte d'une part les DSLAM Alcatel UD observés à l'occasion de la visite du site de Raspail et d'autre part le barème de prix Alcatel produit par Colt.
Colt calcule ainsi que les coûts au port occupé évoluent ainsi respectivement de 28 euros à 47,7 euros pour les cartes ADSL et de 255 euros à 160,7 euros pour les cartes SDSL.
Concernant les coûts de châssis, Colt les réévalue en tenant compte des caractéristiques des DSLAM Alcatel UD indiquées dans le compte rendu de visite du site de Raspail, du barème de prix Alcatel produit par Colt et des taux de remplissage moyens avancés par France Télécom.
Colt obtient ainsi, en retenant une durée d'amortissement de cinq ans, des coûts annuels au port occupé, châssis compris, de 11,8 euros par an en ADSL (soit 0,98 euros par mois) et 37,39 euros en SDSL (soit 3,12 euros par mois).
Colt estime que le taux de remplissage moyen de 36,66 % avancé par France Télécom est vrai à la date du calcul, mais sous-estimé pour 2006, du fait de l'augmentation rapide de la proportion des accès SDSL.
Colt se dit stupéfaite des coûts annuels plus élevés fournis par France Télécom (60 euros en ADSL et 1132 euros en SDSL), obtenus à partir de l'utilisation des « comptes réglementaires ». Colt s'interroge sur les règles aboutissant à un tel résultat.
Colt précise que le certificat du cabinet Mazars et Guérard, produit par France Télécom le 1er décembre 2005, ne se prononce pas sur les coûts prévisionnels 2005 mais uniquement sur six comptes individualisés pour 2003 et 2004.
Colt ajoute que la mission du cabinet Mazars n'est pas d'apprécier la pertinence de l'allocation des coûts dans chaque sous-compte mais de vérifier globalement que les coûts de France Télécom sont reflétés correctement compte tenu des exigences réglementaires, pour les six comptes individualisés concernés. Colt précise que le cabinet Mazars n'a en outre pas vérifié que ces coûts correspondent à ceux d'une prestation efficace.
Colt indique que sa demande ne remet absolument pas en cause la sincérité ou l'exactitude des comptes globaux, tels que certifiés par le cabinet Mazars.
Colt estime que les calculs de France Télécom présentent d'autres incohérences, liées à des divisions des coûts totaux par un nombre d'accès différents selon les cas ou une utilisation variable de coûts prévisionnels ou de chiffres réels.
Concernant le SAV, Colt souligne que France Télécom, dans ses écritures, donne un coût total sans démontrer en quoi il s'agit d'un coût supplémentaire par rapport au SAV de la prestation DSL Access.
Concernant l'EAS, Colt estime qu'il doit être amorti sur cinq ans comme les autres équipements de réseau et non sur trois ans comme l'avance France Télécom. Colt ajoute que bien que l'ACE 2002 n'ait pas de successeurs, d'autres produits moins chers présentent les mêmes fonctionnalités.
Colt estime que France Télécom n'apporte aucun élément de preuve pour les coûts d'installation et de mise en service, les coûts d'exploitation, supervision, maintenance et GTR, les coûts commerciaux, les coûts de création de VC de bout en bout, les coûts communs et les coûts DIVOP, et qu'elle se contente de faire référence aux comptes réglementaires ;
Vu la lettre de l'adjoint au chef du service juridique, en date du 2 décembre 2005, convoquant les parties à une audience devant le collège le 13 décembre 2005 ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 5 décembre 2005 transmettant des observations en réponse au courrier de la société Colt du 2 décembre 2005 ;
France Télécom note que le courrier de la société Colt enregistré le 2 décembre 2005 répond à des arguments de France Télécom opposés depuis près de dix jours, dans un calendrier qui contraint l'Autorité à ne laisser à France Télécom qu'un délai minimal pour répondre.
France Télécom estime que Colt n'apporte aucun élément sérieux de démonstration permettant de remettre en cause la véracité des informations communiquées par France Télécom.
France Télécom rappelle que la véracité des comptes réglementaires ne peut être contestée sans en remettre en cause les modalités de contrôle, opérées par voie d'audit, cet audit étant validé par une décision de conformité du président de l'Autorité.
France Télécom précise que si l'attestation de conformité ne porte que sur des coûts constatés ce n'est que la conséquence des exigences réglementaires, les coûts prévisionnels 2005 ayant également été soigneusement examinés.
France Télécom indique que pour l'ensemble de ses calculs elle a considéré les coûts de remplacement prévisionnels 2005 sur la base du parc Turbo DSL estimé dans le plan prévisionnel de mi-2004, soit 142 612 accès. France Télécom précise par ailleurs que les coûts prévisionnels 2006, sur la base des plans de mi 2005, ne sont pas encore disponibles et qu'il n'est donc pas possible d'établir un compte des coûts de l'accès Turbo DSL cohérent à mi-2005.
France Télécom ajoute que Colt a inséré dans ses écritures des coûts supplémentaires de SAV sans explications, et rapporté des coûts de SAV à un parc ultérieur pour lequel les coûts réels n'ont pas encore été comptabilisés.
France Télécom liste l'ensemble des postes de coûts liés à l'accès Turbo DSL à partir des ses coûts prévisionnels 2005 et obtient un coût total mensuel par accès pour l'ensemble de la prestation de 64,56 euros.
Concernant les DSLAM, France Télécom précise que le site Raspail, auquel Colt fait à plusieurs reprises référence, ne peut être considéré comme représentatif de tous les sites. France Télécom ajoute en effet que, conformément à ce qui est indiqué dans le procès-verbal de visite du site de Raspail, Alcatel a été certes retenu pour l'ensemble des sites parisiens, mais que sur d'autres régions France Télécom a pu faire appel à d'autres fournisseurs. Pour les calculs de coûts de remplacement prévisionnels 2005, France Télécom a retenu la technologie ECI dans la mesure où elle est représentative de la meilleure technologie disponible et existe dans toutes les tailles de DSLAM depuis 2003.
France Télécom précise que les coûts nus de DSLAM évalués par Colt sont non fondés car, outre qu'ils prennent comme base la technologie Alcatel non représentative, ils ne tiennent pas compte des coûts de patrimoine et d'exploitation, qui incluent en plus du coût d'investissement la superficie occupée, l'environnement technique, les coûts de personnel et d'exploitation et les charges indirectes.
France Télécom rappelle ensuite les éléments précis du calcul, tel qu'établi dans sa réponse au premier questionnaire des rapporteurs.
Concernant les comptes réglementaires, France Télécom précise qu'il faut distinguer l'attestation de conformité de l'audit effectué sur les coûts prévisionnels.
France Télécom souligne que Colt confond la notion de coûts prévisionnels avec la méthode de coût appliqué (les CMILT).
France Télécom précise que le cabinet Mazars a audité la constitution des comptes d'exploitation par produits parmi lesquels Turbo DSL.
France Télécom ajoute que déconsolider les données remontées par les unités d'affaires sur les autres postes de coûts exigerait des délais supérieurs à celui du présent règlement de différend.
Concernant le SAV, France Télécom précise que les coûts de SAV sont issus des remontées d'environ 25 unités intervention clients à la direction ventes et services France de la DIVOP. France Télécom a fourni dans sa réponse au premier questionnaire des rapporteurs un essai de modélisation de ses coûts de SAV, fondé sur des dires d'experts et en cohérence avec les données de coûts prévisionnels 2005. France Télécom obtient [...] pour un parc de 142 612 accès à mi-2004. France Télécom avait par ailleurs fourni une projection prévisionnelle sur le parc à mi-2005 qui s'appuyait sur des données inchangées par rapport à 2004, notamment des coûts horaires moyens du personnel identiques.
France Télécom précise qu'il n'y a donc aucun coût supplémentaire à envisager pour les coûts prévisionnels 2005 par rapport aux coûts de SAV de la prestation DSL Access ;
Vu le courrier de la société Colt Télécommunications enregistré le 9 décembre 2005 souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ;
Vu le courrier de la société France Télécom enregistré le 12 décembre 2005 souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ;
Après avoir entendu le 13 décembre 2005, lors de l'audience devant le collège (composé de MM. Paul Champsaur, EdouardBridoux, Nicolas Curien, Michel Feneyrol et de Mme Joëlle Toledano) :
- le rapport de M. Sylvain Moll, rapporteur, présentant les conclusions et les moyens des parties ;
- les observations de MM. Richard Blaustein, Emmanuel Tricaud, pour la société Colt Télécommunications France et de Me Winston Maxwell, cabinet Hogan & Hartson ;
- les observations de MM. Eric Debroeck, Philippe Dubois, pour la société France Télécom ;
En présence de :
MM. Richard Blaustein, Emmanuel Tricaud, pour la société Colt Télécommunications France et de Me Winston Maxwell, cabinet Hogan & Hartson ;
MM. Eric Debroeck, Gabriel Lluch, Philippe Dubois, Mmes Mireille Nouvion, Catherine Ayrault, pour la société France Télécom ;
M. Philippe Distler, directeur général, MM. Sylvain Moll, Igor Primault, Laurent Laganier, Matthieu Allard, Mmes Joëlle Adda, Christine Galliard, agents de l'Autorité ;
Sur la publicité de l'audience
L'article 14 du règlement intérieur susvisé dispose que « l'audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n'est pas conjointe le collège de l'Autorité en délibère ». Colt Télécommunications et France Télécom ont indiqué, par courriers respectifs des 9 et 12 décembre 2005, qu'elles ne souhaitaient pas que l'audience soit publique. Par conséquent, l'audience n'a pas été publique.
Le collège (MM. Paul Champsaur, Edouard Bridoux, Nicolas Curien, Michel Feneyrol et Mme Joëlle Toledano) en ayant délibéré le 15 décembre 2005, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité,
adopte la présente décision fondée sur les faits et les moyens exposés ci-après.
1. Sur la compétence de l'Autorité
Aux termes de l'article L. 36-8 I du CPCE « en cas de refus d'accès ou d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès au réseau de communications électroniques, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut être saisie du différend par l'une ou l'autre partie ».
En outre, l'article L. 36-8-II dispose qu'« en cas d'échec des négociations commerciales l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut également être saisie des différends relatifs à la mise en oeuvre des obligations des opérateurs prévues par le présent titre, ainsi que celles du chapitre III du titre II ».
Il résulte de ces dispositions que l'Autorité peut être saisie d'une demande de règlement de différend par un opérateur qui a signé une convention d'accès avec un autre opérateur, afin de trancher notamment un litige relatif à un désaccord sur l'exécution d'une convention d'accès ou un échec des négociations commerciales relatives notamment à la mise en oeuvre des obligations d'un opérateur.
L'article L. 32-8 du CPCE dispose qu'« on entend par accès toute mise à disposition de moyens, matériels ou logiciels, ou de services, en vue de permettre au bénéficiaire de fournir des services de communications électroniques. Ne sont pas visés par le présent code les systèmes d'accès sous condition et les systèmes techniques permettant la réception de services de communication audiovisuelle, définis et réglementés par la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ».
L'Autorité, dans sa décision no 2005-0280, en date du 19 mai 2005, a indiqué dans son article 2 que « les prestations de gros d'accès large bande livrées au niveau régional proposées actuellement par France Télécom, notamment à travers les offres ADSL Connect ATM, Turbo DSL et IP/ADSL régionale, sont maintenues ».
Depuis la notification de ladite décision le 27 juin 2005 à France Télécom, cette dernière a publié, fin juillet 2005, conformément à l'obligation de publication d'une offre de référence qui lui incombe, une nouvelle offre intitulée « DSL Entreprises ».
Il résulte, d'une part, de la décision précitée que la prestation, proposée par France Télécom que ce soit dans le cadre de l'offre « Turbo DSL » ou dans le cadre de l'offre « DSL Entreprises », a pour finalité de déterminer les modalités techniques et financières d'une offre d'accès permettant à Colt de fournir de l'accès haut débit de type professionnel à ses clients et, d'autre part, des dispositions de l'article L. 36-8-II que l'Autorité est compétente pour trancher un litige résultant de l'échec des négociations relatif à la mise en oeuvre des obligations incombant à France Télécom à la suite de la notification de la décision no 2005-0280 du 19 mai 2005.
Il s'ensuit que de telles offres doivent être regardées comme une prestation d'accès au sens de l'article L. 32-8 précité et que, par conséquent, l'Autorité est compétente pour trancher ce litige.
2. Sur la fin de non-recevoir opposée par France Télécom
Sur les conclusions présentées par France Télécom tendant à ce que l'Autorité constate l'irrecevabilité des modifications apportées par Colt dans ses observations enregistrées le 14 octobre 2005 quant à la formulation de ses demandes initiales et des dates de prise d'effet desdites demandes.
France Télécom, dans ses observations enregistrées le 4 novembre 2005, soutient que les nouvelles demandes formulées par Colt dans ses observations du 14 octobre 2005 ne constituent pas des demandes additionnelles au sens de la décision de l'Autorité no 2000-489 en date du 26 mai 2000.
Aux termes de l'article 9 du règlement intérieur de l'Autorité : « La saisine et les pièces annexées sont adressées à l'Autorité en autant d'exemplaires que de parties concernées plus neuf exemplaires :
- soit par lettre recommandée avec avis de réception ;
- soit par dépôt au siège de l'Autorité contre délivrance d'un récépissé.
La saisine indique les faits qui sont à l'origine du différend, expose les moyens invoqués et précise les conclusions présentées.
Elle indique également la qualité du demandeur, et notamment :
- si le demandeur est une personne physique : ses nom, prénom, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
- si le demandeur est une personne morale : sa dénomination, sa forme, son siège social, l'organe qui la représente légalement et la qualité de la personne qui a signé la saisine ; les statuts sont joints à la saisine.
Le demandeur doit préciser les nom, prénom et domicile du ou des défendeurs ou, s'il s'agit d'une ou plusieurs personnes morales, leur dénomination et leur siège social.
Si la saisine ne satisfait pas aux règles mentionnées ci-dessus, le chef du service juridique ou son adjoint met en demeure le demandeur par lettre recommandée avec avis de réception de la compléter. Le délai mentionné à l'article R. 11-1 du code des postes et télécommunications ne court qu'à réception des éléments manquants.
Dès lors que la saisine est complète, elle est inscrite sur un registre d'ordre et marquée indiquant sa date d'arrivée.
Les pièces adressées à l'Autorité en cours d'instruction sont également marquées d'un timbre indiquant leur date d'arrivée. »
Aux termes de l'article 10 du règlement intérieur de l'Autorité : « Dès lors que la saisine est complète, le chef du service juridique ou son adjoint désigne un rapporteur et un rapporteur adjoint.
Le chef du service juridique ou son adjoint adresse par lettre recommandée avec avis de réception à la ou aux parties mentionnées dans la saisine les documents suivants :
- copie de l'acte de saisine ;
- copie des pièces annexées à l'acte de saisine ; »
Il résulte de ces dispositions qu'elles ont pour seule fin de dresser la liste des pièces et des éléments d'information que toute saisine de l'Autorité doit comprendre, à peine de non déclenchement du délai mentionné à l'article R. 11-1 du CPCE. En outre, il ressort également que l'article 9 du règlement intérieur n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire que, le cas échéant, les conclusions des parties puissent être précisées au cours de la procédure.
Or, au cas d'espèce, les observations de Colt déposées le 14 octobre 2005 et tendant à modifier la date de prise d'effet des évolutions tarifaires demandées n'ont pas pour objet de formuler une nouvelle demande, mais de préciser le champ d'application dans le temps des demandes initiales. Ainsi, si lors de la saisine du 19 août 2005, Colt demandait à l'Autorité de modifier les tarifs de l'offre Turbo DSL du 1er janvier 2005 au 1er août 2005 et certains tarifs de l'offre DSL Entreprises à compter du 1er août 2005, elle demande désormais à l'Autorité de fixer lesdits tarifs respectivement du 1er janvier 2005 au 22 juin 2005 et à compter du 22 juin 2005.
Il s'ensuit que la demande susvisée de Colt, visant à modifier le champ d'application dans le temps de ses demandes initiales, ne méconnaît pas les dispositions précitées du règlement intérieur de l'Autorité, et que par suite, France Télécom ne peut se fonder sur ce motif, pour invoquer son irrecevabilité.
3. Sur la recevabilité des demandes de Colt
3.1. Sur les demandes non recevables
3.1.1. Sur les conclusions de Colt, enregistrées le 14 octobre 2005, tendant à ce que l'Autorité fixe un tarif pour la prestation Turbo DSL fournie à Colt à un montant égal à 25 % du montant demandé par France Télécom avec effet au 1er janvier 2005 et jusqu'au 22 juin 2005
Au terme de l'article L. 36-7 (5°) du code des postes et des télécommunications, l'Autorité « émet un avis public sur les tarifs des services pour lesquels il n'existe pas de concurrents sur le marché, préalablement, lorsqu'ils y sont soumis, à leur homologation par les ministres chargés des télécommunications et de l'économie ».
Il résulte des dispositions de l'article 133 de la loi du 9 juillet 2004, qui maintiennent l'application des dispositions susvisées jusqu'à la mise en oeuvre du nouveau cadre, qu'il appartenait à France Télécom, jusqu'à l'issue de l'analyse des marchés, de soumettre l'offre Turbo DSL ses évolutions à l'avis de l'Autorité et à l'homologation du ministre en charge des télécommunications et de l'économie, puisqu'il n'existait pas de concurrent sur ce marché.
France Télécom a régulièrement soumis les tarifs de cette offre à l'avis de l'Autorité et fait homologuer lesdits tarifs par le ministre et répercuté dans les conventions passées avec ses clients la grille des tarifs homologués. Les dernières évolutions de l'offre Turbo DSL ont fait l'objet des avis no 2004-774, en date du 16 septembre 2004, et no 2005-0397 en date du 12 mai 2005 et ont été homologuées par le ministre, dans des courriers respectifs en date du 12 octobre 2004 et du 27 mai 2005.
Il résulte de cette procédure que les tarifs de l'offre Turbo DSL étaient fixés par le ministre et qu'au regard des attributions confiées à l'Autorité par la procédure définie à l'article L. 36-8 du CPCE, il n'appartient pas à l'Autorité, dans le cadre d'un règlement de différend, de modifier rétroactivement lesdits tarifs.
Il s'ensuit que la demande de Colt visant à la fixation d'un tarif pour la prestation Turbo DSL à un montant égal à 25 % du montant demandé par France Télécom avec effet du 1er janvier 2005 au 22 juin 2005, dans le cadre du présent règlement de différend, doit être considérée comme irrecevable au motif que le tarif de cette prestation a été homologué par le ministre compétent.
3.1.2. Sur la nouvelle demande tendant à ce que les rapporteurs intègrent dans leur questionnaire le contenu de la future consultation publique sur la méthode d'évaluation des coûts pour l'offre « bitstream » afin de respecter le principe du contradictoire
Aux termes de l'article L. 36-8 du CPCE, « l'Autorité se prononce, dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, après avoir mis les parties à même de présenter leurs observations et, le cas échéant, procédé à des consultations techniques, économiques ou juridiques, ou expertises respectant le secret de l'instruction du litige dans les conditions prévues par le présent code ».
L'Autorité relève que dans le cadre de l'instruction les parties ont pu présenter leurs observations à de nombreuses reprises et qu'elles ont répondu à deux questionnaires précis élaborés par les rapporteurs.
Dans ses conclusions enregistrées le 14 octobre 2005, Colt demande aux rapporteurs d'intégrer dans leur questionnaire le contenu de la future consultation publique sur la méthode d'évaluation des coûts pour l'offre « bitstream ».
Outre le fait que les rapporteurs conservent la maîtrise des consultations techniques, économiques ou juridiques ou expertises nécessaires à la résolution du différend puisque l'article L. 36-8 indique, à travers l'expression « le cas échéant », que l'Autorise conserve la maîtrise des consultations à mener, il ne peut être fait droit à la demande de Colt car le projet de consultation publique n'est pas encore adopté et par conséquent non publié.
Par conséquent, étant donné que le projet de consultation publique n'est pas encore arrêté et publié, la demande de Colt tendant à voir intégrer dans le questionnaire des rapporteurs la future consultation publique de l'Autorité sur la méthode d'évaluation des coûts pour l'offre « bitstream » est sans objet.
3.2. Sur les demandes recevables
3.2.1. Sur les conclusions de Colt, enregistrées le 14 octobre 2005 tendant à ce qu'à compter du 22 juin 2005 l'ensemble du parc de liaisons de Colt sera facturé par France Télécom, sans frais de migration ni de migration technique, selon la nouvelle offre tarifaire DSL Entreprises, telle que modifiée à la suite des demandes décrites ci-dessous :
a) Le tarif de l'abonnement mensuel de l'accès pour l'offre DSL Entreprises aux niveaux suivants :
ADSL, 1 paire : 20,80 euros hors taxes au plus ;
SDSL, 1 paire : 22,00 euros hors taxes au plus ;
b) Le tarif mensuel pour la prestation porte 155 Mbit/s en colocalisation dans l'offre DSL Entreprises à 92,00 euros hors taxes au plus.
Aux termes de l'article L. 36-8 du CPCE, « en cas de refus d'accès ou d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès au réseau de communications électroniques », mais aussi en cas d'échec des négociations commerciales relatives « à la mise en oeuvre des obligations des opérateurs » prévues par le titre Ier du livre II du CPCE, l'Autorité peut être saisie du différend par l'une ou l'autre des parties.
A compter du 27 juin 2005, date de la notification à France Télécom de la décision no 2005-0280 de l'Autorité, en date du 19 mai 2005, et en application des articles L. 38 et D. 301 à D. 315 du CPCE, France Télécom est tenue :
- de faire droit à toute demande raisonnable d'accès à des éléments de réseau, ou à des moyens qui y sont associés portant sur le marché de gros des offres d'accès larges bande livrées au niveau régional ;
- de maintenir sans frais de migration les prestations de gros d'accès large bande livrées au niveau régional proposées avant cette date par France Télécom, notamment à travers l'offre Turbo DSL et de les inscrire à l'offre technique et tarifaire d'accès large bande livrée au niveau régional ;
- de ne pas pratiquer de tarifs d'éviction sur le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional à compter de la notification de la décision ;
- de publier dans le mois suivant la date de la notification de la décision précitée une offre technique et tarifaire détaillée d'accès large bande livrée au niveau régional avec les prestations d'accès large bande livrées au niveau régional et leurs modalités de façon détaillée en précisant au minimum les éléments listés en annexe de ladite décision ;
- d'offrir les prestations d'accès large bande livrées au niveau régional ainsi que les prestations associées à des tarifs reflétant les coûts correspondants, sous réserve de ne pas pratiquer de tarifs d'éviction sur le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional.
Par cette décision, la procédure d'homologation, jusqu'ici applicable aux prix de l'offre Turbo DSL prend fin, et les prix de l'offre qui doit se poursuivre doivent désormais refléter les coûts correspondants, sauf s'ils donnent lieu à un effet d'éviction sur le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional.
Il ressort du dossier que les sociétés Colt et France Télécom ont signé un contrat relatif à l'offre Turbo DSL dès 1999 afin de permettre à Colt de bénéficier des prestations de cette offre et d'offrir ainsi via ces prestations, des services IP-VPN à ses clients entreprises.
Il résulte des pièces du dossier que, depuis le 21 octobre 2004, Colt a demandé régulièrement à France Télécom d'initier une baisse significative des prix de l'offre Turbo DSL et que par courrier du 13 juin 2005, soit plusieurs semaines après l'adoption de la décision no 2005-0280 mais avant son entrée en vigueur, Colt a réitéré sa demande visant à obtenir une baisse de 75 % des tarifs de la prestation Turbo DSL, ce avec effet au 1er janvier 2005, et a informé France Télécom de sa volonté de saisir l'Autorité en cas d'absence de réponse favorable au 30 juin 2005.
Par courrier du 8 juillet 2005, Colt a proposé à France Télécom une méthode de tarification de l'offre de référence « bitstream » et a demandé une réduction des tarifs de 75 % des tarifs actuels de l'offre Turbo DSL de France Télécom (par rapport à ceux du premier semestre 2005) et qu'il y ait cohérence de la tarification de cette offre avec les produits comme ADSL Connect ATM et IP-ADSL, ce afin que ladite offre soit conforme aux obligations réglementaires de France Télécom.
Le 21 juillet 2005, France Télécom a répondu à la lettre de Colt du 13 juin 2005 en rappelant qu'elle ne pouvait modifier des tarifs homologués et que la décision tarifaire entrant en vigueur au 1er juillet 2005 conduisait à une baisse des tarifs. France Télécom a également indiqué que la nouvelle offre qui allait être publiée fin juillet serait de nature à répondre aux attentes de Colt.
Par courrier du 29 juillet 2005, Colt a informé France Télécom qu'elle était satisfaite de constater que France Télécom acceptait les demandes de Colt du 8 juillet 2005 sur la séparation de l'accès et de la collecte mais aussi sur la tarification du trafic ATM. Cependant Colt a indiqué que les nouveaux tarifs relatifs aux accès et aux portes tels que présentés le 27 juillet 2005 ne correspondaient pas à ses attentes et notamment à l'obligation d'orientation vers les coûts de France Télécom. Elle a aussi précisé que la date d'application des nouveaux tarifs, pour la collecte ATM, ne répondait pas à ses demandes. Colt a donc reformulé ses demandes à France Télécom afin de voir appliquer à son parc de liaisons existant et à compter du 1er janvier 2005 de nouveaux tarifs sur la base de la structure tarifaire de l'offre DSL Entreprises modifiée.
France Télécom, par courrier du 10 août 2005 a indiqué qu'elle ne pouvait répondre favorablement aux demandes de Colt visant à lui appliquer des tarifs spécifiques à compter du 1er janvier 2005 et que ses nouveaux tarifs ont été déterminés sur la base des obligations réglementaires qui lui sont applicables, à savoir l'orientation vers les coûts.
Le 19 août 2005, estimant que France Télécom ne répondrait pas à ses demandes, Colt a saisi l'Autorité d'un règlement de différend relatif notamment aux tarifs des accès et des portes de l'offre de France Télécom et à la date d'application d'une nouvelle grille tarifaire, pour son parc de liaisons existant.
Il s'ensuit que ces échanges de correspondances ainsi que les différentes réunions entre les parties doivent être regardés comme traduisant un échec des négociations, au sens des dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE, d'une part sur le niveau de certains tarifs de l'offre de France Télécom et d'autre part sur la date d'application des tarifs de la nouvelle offre, le cas échéant modifiés.
Par conséquent, la demande de Colt susvisée tendant à ce que l'ensemble du parc de liaisons de Colt soit facturé par France Télécom, sans frais de migration ni de migration technique, selon la nouvelle offre tarifaire DSL Entreprises, telle que modifiée à la suite des demandes décrites ci-dessus, est recevable.
4. Contexte
Le litige porte sur les tarifs de France Télécom pour les offres de gros d'accès large bande livrées au niveau régional à destination de la clientèle professionnelle et sur leur date d'application.
Ces offres de gros sont utilisées par les opérateurs alternatifs, en complément de leur propre réseau, pour proposer in fine sur le marché de détail professionnel des services à valeur ajoutée (réseaux privés virtuels, Internet, voix...). Ces offres se distinguent des offres résidentielles par des caractéristiques plus exigeantes en termes de garantie des débits et de niveau de qualité du service.
Le fonctionnement du marché des offres de gros d'accès large bande livrées au niveau régional, et sa dynamique concurrentielle, ont été étudiés par l'Autorité dans son analyse des marchés (voir notamment la consultation publique de juin 2004 sur l'analyse des marchés du haut débit, et les décisions n°s 2005-0278 et 2005-0280 de l'Autorité en date du 19 mai 2005). Les grandes lignes de cette analyse sont rappelées ci-dessous.
4.1. Fonctionnement du marché
4.1.1. Le marché de détail
Comme dans les documents d'analyse des marchés, on appelle « offres professionnelles » les offres présentant des caractéristiques de garantie de débit et de qualité de service adaptées aux besoins spécifiques des entreprises, par opposition aux offres « résidentielles », standard. Il se peut cependant que des entreprises achètent des offres « résidentielles ». C'est notamment le cas des plus petites entreprises dont les besoins télécoms en termes de prix et de débit sont similaires à ceux du grand public.
Le marché de détail du DSL dit « professionnel » présente des caractéristiques de taux de croissance et de développement de la concurrence moins dynamiques que celles observées sur le marché de détail du DSL dit « résidentiel ».
Le marché professionnel comptait environ 195 000 accès à la fin du troisième trimestre 2005. La croissance du nombre d'accès DSL professionnels a été de 45 % au cours des 12 derniers mois, alors que sur la même période le marché résidentiel a cru de 60 %.
Les parts de marché gagnées par les opérateurs alternatifs restent limitées. L'Autorité estime ainsi que Transpac détient encore entre 70 % et 75 % du marché de détail professionnel fin 2005, quand la part de marché du groupe France Télécom sur le marché de détail résidentiel est de l'ordre de 50 %.
Par ailleurs, la présence des acteurs alternatifs est plus morcelée sur le segment professionnel. Neuf Cegetel, premier alternatif, est positionné à la fois sur les marchés du DSL résidentiel et professionnel. Les autres opérateurs alternatifs, comme Completel, Colt ou MCI, adressent exclusivement la clientèle professionnelle, et se partagent une part du marché DSL professionnel relativement faible (quelques pourcents). Leur stratégie sur les marchés professionnels a été jusqu'à présent centrée sur le déploiement de fibres dans les zones d'affaires plutôt que sur le DSL.
4.1.2. Le marché de gros
Deux types d'offres de gros sont utilisés par les opérateurs alternatifs pour pouvoir proposer, sur le marché de détail professionnel, des offres d'accès DSL : le dégroupage de la boucle locale d'une part, et les offres de gros d'accès large bande livrées au niveau régional d'autre part.
Les opérateurs utilisent à près de 95 % l'offre de gros régionale de France Télécom (anciennement Turbo DSL). Le dégroupage ne concerne que 5 % des accès - alors qu'il représente 30 % du marché résidentiel. Une des explications possibles de ce retard du dégroupage sur le marché professionnel est le décalage de qualité de service entre l'offre de gros régionale de France Télécom et le dégroupage total.
Jusqu'à présent, seules Neuf Cegetel et Colt utilisaient le dégroupage pour les entreprises, Neuf Cegetel sur une couverture étendue, et Colt sur une couverture restreinte à une soixantaine de sites, essentiellement à Paris et dans les Hauts-de-Seine.
Néanmoins, les investissements annoncés récemment par Colt et Completel dans le dégroupage professionnel sont susceptibles d'en relancer la croissance.
La société Completel a ainsi indiqué le 22 juillet 2005, investir 84 millions d'euros en 2005 et 2006 dans le dégroupage professionnel. Elle compte desservir progressivement de 9 à 80 agglomérations et a annoncé avoir d'ores et déjà commandé à France Télécom l'équipement de 250 répartiteurs (résultats T3 2005 présentés par Completel le 8 novembre 2005). Colt a, par ailleurs, fait état d'une relance de son déploiement pour toucher 129 sites en 2006 puis entre 159 et 239 répartiteurs en 2007.
4.2. Cadre juridique
Le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional fait partie des marchés pertinents soumis à une régulation ex ante, mise en oeuvre par les décisions n°s 2005-0278 et 2005-0280 du 19 mai 2005 de l'Autorité, adoptées au terme de son analyse de marché.
France Télécom est déclarée exercer une influence significative sur ce marché, qui comprend les offres de gros d'accès large bande DSL livrées au niveau régional indépendamment du type de clientèle finale visée et de l'interface de livraison utilisée.
La régulation de ce marché s'articule notamment autour des obligations suivantes :
France Télécom doit publier une offre de référence que l'Autorité a le pouvoir de modifier ;
France Télécom doit faire droit à toute demande raisonnable d'accès, dans des conditions non discriminatoires ;
France Télécom doit publier certaines informations (indicateurs de qualité de service...) et est soumise à une obligation de séparation comptable ;
France Télécom est soumise des obligations concernant les tarifs de cette offre, ces obligations sont détaillées ci-après.
4.3. Périmètre des demandes de Colt
France Télécom a publié la première offre de référence « Offre d'accès et de collecte DSL » le 27 juillet 2005. S'agissant de l'offre DSL Entreprises, elle est subdivisée en trois prestations principales : l'accès, la collecte et le raccordement.
Les modifications des tarifs de l'accès et du raccordement de l'offre DSL Entreprises font l'objet des demandes 2° et 3° de Colt et seront respectivement étudiées dans les parties 5 et 6 de la présente décision. La date d'application des tarifs ainsi modifiés sera traitée dans la partie 7 de la présente décision.
S'agissant de la prestation de collecte, Colt ne formule pas de demande quant à la modification des tarifs de l'offre DSL Entreprises. Sa demande ne porte que sur la date d'application de ces nouveaux tarifs de collecte pour son parc de liaisons existant. Cette demande sera traitée dans la partie 7 de la présente décision.
Tous les montants indiqués dans la suite de la présente décision s'entendent hors taxes.
5. Sur la demande de Colt portant sur le tarif de l'accès
5.1. Remarque préliminaire
Le tarif de l'accès de l'offre DSL Entreprises est constitué de deux éléments :
- des frais d'accès au service (FAS) par ligne, d'une part ;
- une redevance mensuelle, d'autre part, qui varie en fonction de la technologie (ADSL ou SDSL) et du nombre de paires utilisées.
Colt demande une modification de l'offre tarifaire « DSL Entreprises » de telle sorte que « l'abonnement mensuel du tarif de l'accès de l'offre DSL Entreprises » soit fixé au plus à un niveau de 20,80 euros par accès par mois pour une paire ADSL et 22,00 euros par accès et par mois pour une paire SDSL, contre respectivement 65 et 75 euros actuellement.
En revanche, les demandes de Colt ne portent pas sur les FAS, qui s'établissent actuellement, selon les conditions tarifaires de l'offre de référence DSL Entreprises, à 300 euros pour un accès sur une paire ADSL ou SDSL.
Dans ces conditions, l'Autorité a étudié globalement la prestation d'accès, en tenant compte à la fois de la mise en service et des frais récurrents, et a évalué si les niveaux actuels de 65 et 75 euros par mois étaient conformes aux obligations réglementaires, pour un niveau de FAS donné de 300 euros.
Dans la suite de la présente décision, le montant de 300 euros initial est donc pris comme référence. Les niveaux des coûts mensuels mis en évidence s'entendent donc comme le volet récurrent d'un calcul global, tenant compte d'un montant initial de 300 euros.
5.2. Principes de tarification
L'article D. 311 du CPCE dispose que, s'agissant des méthodes de tarification retenues, l'Autorité « veille à ce que les méthodes retenues promeuvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur ».
Pour le haut débit, l'Autorité considère à la lumière de cet article que le développement du dégroupage doit être privilégié. Le dégroupage constitue en effet la forme d'offre de gros permettant le développement de la concurrence la plus pérenne, car il optimise l'indépendance de l'opérateur client par rapport à France Télécom, en termes techniques et économiques. Dans la durée, le développement de la concurrence par le dégroupage permet une baisse des prix durable et une dynamique d'innovation bénéficiant aux consommateurs.
En conséquence, les obligations tarifaires pesant sur France Télécom au titre de la régulation du marché de gros de l'accès large bande livré au niveau régional visent un double objectif : garantir le dynamisme de la concurrence sur le marché de détail, tout en favorisant l'investissement des opérateurs dans le dégroupage.
Formellement, cet objectif se traduit par le dispositif de régulation tarifaire de la décision d'analyse de marché du DSL no 2005-0280 adoptée le 19 mai 2005 :
- l'article 9 de la décision no 05-0280 dispose que « France Télécom est tenue de ne pas pratiquer de tarifs d'éviction sur le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau régional » ; cet article interdit à France Télécom de pratiquer des prix trop bas, qui évinceraient les opérateurs dégroupeurs concurrents ;
- l'article 10 dispose que « France Télécom doit offrir les prestations d'accès large bande livrées au niveau régional ainsi que les prestations associées à des tarifs reflétant les coûts correspondants, sous réserve du respect de l'article 9 de la présente décision. L'Autorité sera amenée à faire évoluer le système de comptabilisation et d'allocation des coûts de France Télécom actuellement en vigueur par une décision complémentaire ultérieure ».
Dans le cadre du présent litige, l'Autorité a donc été amenée à évaluer, d'une part, les coûts de France Télécom pour fournir le service d'accès pour l'offre DSL Entreprises et, d'autre part, les coûts d'un opérateur alternatif efficace. Deux types d'opérateur alternatifs ont été considérés : un opérateur mixte desservant les clientèles résidentielle et professionnelle, et un opérateur « entreprises » étant actif exclusivement sur le segment professionnel du marché.
Il ressort des évaluations exposées en parties suivantes que les coûts de production de France Télécom d'une part, et ceux d'un opérateur mixte d'autre part, bénéficient d'économies d'échelle et de gamme importantes. Les coûts de production d'un opérateur alternatif exclusivement « entreprises » apparaissent comme supérieurs à ceux d'un opérateur mixte d'une part, et à ceux de France Télécom d'autre part, car certaines économies de gamme disparaissent et les économies d'échelle s'amenuisent.
L'Autorité note que les parties ont consacré de nombreux développements à l'évaluation des coûts de France Télécom pour la production de l'offre DSL Entreprises, et que Colt a demandé que les tarifs de l'offre soient orientés vers ces coûts de production. Cependant, il apparaît au terme de l'analyse menée de l'évaluation des coûts que retenir les coûts de France Télécom à des fins de tarification de l'offre régionale professionnelle conduirait à un tarif d'éviction pour le dégroupage. Il découle donc des principes énoncés par l'article 10 de la décision no 2005-0280 que les coûts de production de France Télécom pour cette offre ne sont pas, au cas d'espèce, pertinents à des fins de tarification.
Ainsi qu'exposé ci-avant, le marché du DSL professionnel est moins dynamique et comporte moins d'acteurs que le marché résidentiel. Seuls deux opérateurs, France Télécom et Neuf Cegetel, adressent à la fois les clientèles résidentielle et professionnelle. France Télécom indique à ce sujet « qu'un opérateur spécialisé sur le marché entreprises ne peut être retenu comme modèle en vue de déterminer les coûts de l'accès dégroupé sur le marché entreprises, le marché s'orientant clairement différemment ».
Deux opérateurs exclusivement « entreprises », Colt et Completel, jouent pourtant un rôle important d'animation du marché, proposant des produits différenciés répondant aux attentes spécifiques des entreprises. Par ailleurs, ces deux opérateurs ont annoncé récemment des plans d'investissements volontaristes visant à élargir leur zone de couverture en dégroupage, et donc la zone de concurrence effective au cours des années 2006 et 2007.
Au cas d'espèce, l'Autorité considère donc raisonnable de considérer comme efficace un opérateur dégroupeur desservant exclusivement la clientèle professionnelle. A ce stade de développement du marché, il n'est pas illogique ni inefficace pour les nouveaux entrants de se focaliser sur des segments de clientèles dont les besoins sont spécifiques. Cette spécialisation se constate dans d'autres pays d'Europe. L'Autorité observe de même que la plupart des acteurs du marché résidentiel ne proposent pas d'offres à destination des clients professionnels.
L'Autorité considérera donc pour calculer le tarif de l'accès de l'offre DSL Entreprises régulée, au regard notamment des objectifs exposés dans l'article D. 311 du CPCE, les coûts de production d'un opérateur alternatif efficace desservant exclusivement la clientèle professionnelle.
La partie 5.3.3 ci-après vise à expliciter ce coût et donc le niveau tarifaire de l'accès DSL professionnel. Ce niveau ressort in fine à 47 euros par mois pour les accès ADSL et à 48 euros par mois pour l'accès SDSL.
Les parties 5.3.4 et 5.4 ci-après visent respectivement à calculer les coûts de production d'un opérateur « mixte » et de France Télécom. Elles mettent en évidence que les niveaux tarifaires de 47 euros par mois pour l'accès ADSL et 48 euros par mois pour le SDSL, sont supérieurs aux coûts de production de ces acteurs. Ces niveaux laissent un espace économique suffisant aux opérateurs mixtes pour proposer du dégroupage professionnel et permettent à France Télécom de recouvrer ses coûts.
5.3. Evaluation des coûts d'un opérateur alternatif efficace
5.3.1. Périmètre de la prestation d'accès
Au regard des pièces échangées lors de l'instruction du présent règlement de différend, il apparaît que les parties s'accordent sur le périmètre global de la prestation d'accès.
Dans le cadre du présent litige, l'Autorité retient donc, conformément aux éléments listés par les parties, les prestations suivantes comme relevant de la prestation d'accès :
- l'usage du réseau, pour la partie comprise entre le client final et le répartiteur optique, situé en aval du DSLAM, et matérialisant le point d'entrée du réseau de collecte. Il s'agit donc de l'usage de la paire de cuivre utilisée dans sa totalité, du DSLAM, de son environnement technique et des liens optiques entre les DSLAM et le répartiteur optique ;
- le service après vente (SAV). Cette prestation inclut la supervision des accès et les moyens nécessaires à la relève des dérangements, pour la prestation standard de garantie de temps de rétablissement (GTR) de l'offre DSL Entreprises, qui est assurée en moins de 4 heures aux heures ouvrables ;
- l'installation et la mise en service des accès.
Les coûts correspondant à cette dernière prestation sont par nature des coûts non récurrents.
De façon générale, à la cible, les coûts non récurrents ont vocation à être recouvrés par les FAS, et les coûts récurrents par l'abonnement mensuel.
Cependant, dans le cadre du présent litige et dans le cadre de la demande de Colt, le montant actuellement facturé de 300 euros de FAS est pris comme une donnée. Il n'est donc pas exclu que les frais initiaux soient pour partie recouvrés à travers le tarif récurrent mensuel.
5.3.2. Elaboration de la modélisation
Afin d'évaluer les coûts de l'accès dégroupé pour un opérateur efficace visant une clientèle résidentielle, l'Autorité a élaboré un modèle réglementaire du coût de l'accès dégroupé en novembre 2004, mis à jour successivement en mars, juillet et novembre 2005.
Ce modèle a été utilisé par l'Autorité à plusieurs reprises (voir notamment l'avis no 2005-0089 en date du 8 février 2005), notamment pour vérifier que les tarifs des offres de gros d'accès large bande livrées au niveau régional ou national, destinées à une clientèle résidentielle, ne provoquaient pas d'effet d'éviction par rapport à un opérateur alternatif efficace ayant recours au dégroupage.
Dans le cadre du présent règlement de différend, ce modèle a été adapté par l'Autorité afin d'estimer les coûts encourus par un opérateur alternatif servant, à l'aide du dégroupage, une clientèle professionnelle. Pour ce faire, l'Autorité a étudié les éléments mis en avant par les parties en réponse aux propositions formulées par les rapporteurs. Les évaluations menées visent à évaluer ces coûts pour la période courant à compter du 8 juillet 2005, au vu des éléments présentés en partie 7, et pour l'année 2006. De ce fait, des paramètres évaluant une situation médiane estimée à mars 2006 sont retenus.
Les modifications apportées par rapport au modèle résidentiel publié par l'Autorité le 18 novembre 2005 sont les suivantes :
Taille du marché
Deux catégories de clientèle se distinguent sur le marché de détail du DSL :
- les clients « grand public », qui achètent des offres asymétriques, à débit non garanti, à des opérateurs adressant la clientèle résidentielle ;
- les clients professionnels qui possèdent des besoins propres : accès symétrique, débit garanti, qualité de service accrue, garantie de temps de rétablissement...
Les besoins des très petites entreprises en termes de haut débit sont généralement similaires à ceux des clients résidentiels.
L'Autorité retient que les opérateurs suivant une stratégie mixte adressent ces deux types de clientèle, tandis que les opérateurs « entreprises », au regard notamment des annonces de Colt et de Completel, adressent la clientèle du second type.
La taille du marché grand public est évaluée dans le modèle de l'accès dégroupé résidentiel, publié le 18 novembre dernier par l'Autorité, à 31 % des paires pour le premier semestre 2006.
La taille du marché professionnel peut être estimée en retenant une approche par la demande, c'est-à-dire en prenant en compte l'ensemble des sites des entreprises dont les effectifs globaux sont compris entre 10 et 5 000 salariés, soit 544 000 sites selon l'étude Datanova (baromètre Novascope de juin 2005).
Conformément à l'étude Datanova et à l'étude IDATE 2005 « Enquête PME - Les entreprises à l'heure de la convergence » qui confirment que les TPE achètent des accès haut débit « grand public », les sites des très petites entreprises (moins de 9 salariés) ne sont pas comptabilisés comme relevant de ce marché. De plus, les sites des entreprises de plus de 5 000 salariés ne sont pas retenus pour tenir compte des sites desservis en fibre.
Colt fait valoir que les sites des TPE doivent être retenus dans la cible des opérateurs « entreprises ». En effet, 22 % des sites qu'elle sert actuellement avec le dégroupage comptent moins de 10 salariés.
Cette donnée ne remet pas en cause le périmètre retenu, dans la mesure où les entreprises de plus de 10 salariés comportent de nombreux sites de moins de 10 salariés, visés par le calcul.
France Télécom s'accorde sur le périmètre des 544 000 sites retenus, mais estime ensuite que chacun de ces sites bénéficie de 6,7 accès réseau en moyenne, dont seuls 7 % sont pertinents, selon elle, pour le dégroupage car il ne faudrait prendre en compte que les groupements d'accès de base les plus importants, ainsi que les accès primaires non mutualisés avec les données et la majorité des accès permanents. Ainsi, selon France Télécom, seuls 250 000 sites doivent être retenus.
L'Autorité constate que ces affirmations ne sont étayées d'aucun élément justificatif. Notamment, l'affirmation selon laquelle seuls certains accès ont vocation à être dégroupés n'est ni étayée ni quantifiée. L'Autorité considère au contraire que, sur une zone ouverte au dégroupage, un opérateur alternatif va avoir recours au dégroupage pour un large panel d'offres - toutes sauf celles à très haut débit, adressables uniquement en fibre, mais qui ont été exclues, en amont, du calcul.
En l'absence de justification aux chiffres avancés par France Télécom, l'Autorité est donc conduite à se fonder sur des chiffres déduits de l'étude Datanova, selon laquelle on peut estimer qu'en mars 2006, 87 % des entreprises relevant du périmètre retenu seront équipées en haut débit, toutes technologies confondues.
Estimant que l'ensemble des paires correspondantes est susceptible d'être dégroupée, l'Autorité retient donc un taux de paires professionnelles dégroupables, sur un site donné, de 87 %.
Coûts d'ingénierie
Contrairement à la version résidentielle du modèle qui évalue les coûts d'ingénierie de façon globale et proportionnels aux coûts techniques, l'Autorité considère pertinent de détailler ces coûts dans le cas présent, du fait de leur importance prépondérante sur le marché professionnel.
L'Autorité retient donc les éléments suivants, qui n'ont pas été remis en cause par les parties :
- un coût d'installation systématique, estimé à 100 euros ;
- un coût récurrent de supervision de l'accès, estimé à 5 euros par ligne et par mois ;
- un coût d'intervention estimé à 100 euros en cas de panne nécessitant un déplacement.
S'agissant du nombre de pannes par ligne et par an nécessitant le déplacement d'un technicien, l'Autorité constate que les deux parties s'interrogent sur le taux de pannes initialement estimé par les rapporteurs, en l'estimant surévalué.
Colt fait état d'un taux de pannes annuel par ligne, constaté sur son propre parc, de 0,1, qui est inférieur au taux moyen mesuré et publié par France Télécom pour l'ensemble des opérateurs. Tenant compte du principe d'efficacité, l'Autorité retient ce taux de pannes annuel de 0,1.
Par ailleurs, il apparaît qu'en cas de panne le déplacement d'un technicien est systématique pour fournir à France Télécom une prélocalisation de la panne. L'Autorité retient donc un taux de 100 % de pannes nécessitant un déplacement d'un technicien de l'opérateur.
Coûts commerciaux
Les coûts commerciaux pris en compte dans le modèle résidentiel visent à estimer les coûts supportés par les opérateurs revendant des accès sur le marché de gros. Dans le cas du marché professionnel, les opérateurs adressant exclusivement la clientèle professionnelle commercialisent directement leurs accès sur le marché de détail. Il n'y a donc pas lieu de prendre en compte de coûts commerciaux.
France Télécom a souligné au cours de l'instruction que, dans le cas d'un opérateur « mixte » adressant la clientèle professionnelle, il était illégitime de ne pas prendre en compte de coûts commerciaux. L'Autorité tient compte de coûts commerciaux de 5 % dans le cas d'un opérateur mixte, comme dans le modèle de l'accès résidentiel, en considérant qu'il revend des accès sur le marché de gros.
Coût des DSLAM
Pour modéliser le coût du DSLAM en dégroupage professionnel, il est nécessaire de tenir compte de l'existence des deux technologies : ADSL et SDSL.
Conformément aux éléments mis en évidence au cours de l'instruction, les deux types de cartes coexistent au sein des mêmes châssis.
S'agissant du prix de ces cartes et châssis, deux gammes de DSLAM ont été exposées par les parties : les DSLAM ECI et les DSLAM Alcatel UD.
Colt a versé aux débats les tarifs issus d'un relevé de prix fourni par le constructeur Alcatel, dont elle est cliente. France Télécom a fourni des éléments de prix sur les DSLAM de marque ECI, sans les assortir d'éléments factuels (factures, relevés comptables...).
La grille tarifaire présentée par Colt met en évidence pour la technologie Alcatel des prix de :
4 609 euros pour le châssis (1 850 et 1 410 euros pour les deux parties du châssis, 220 euros pour la carte ACU et 1 129 euros pour la carte STM1) pouvant accueillir 16 cartes, soit 384 ports ;
1 069 euros pour une carte ADSL de 24 ports (dont 973 euros de carte proprement dite, plus les coûts de licence) ;
1 510 euros pour une carte SDSL de 24 ports (dont 1 414 euros de carte proprement dite, plus les coûts de licence).
Un châssis Alcatel comporte donc au total 384 ports, ADSL ou SDSL.
Sur la base des éléments fournis par France Télécom, l'Autorité a retenu, pour la technologie ECI :
3 500 euros pour le châssis pouvant accueillir 15 cartes ;
1 525 euros pour une carte ADSL de 64 ports ;
1 496 euros pour une carte SDSL de 16 ports.
Il est tenu compte en sus de ces montants d'un coût d'installation du DSLAM égal à 10 % de son coût total, puis d'un coût annuel d'exploitation de 10 % du coût d'investissement, que les parties n'ont pas remis en cause au cours des échanges.
Pour évaluer les coûts respectifs par port ADSL et SDSL, il est de plus nécessaire d'évaluer la part des accès SDSL dans le parc total de l'opérateur. Sur la base des chiffres prospectifs transmis par France Télécom pour mi-2006, l'Autorité retient une part de 35 % de SDSL pour un opérateur adressant exclusivement la clientèle professionnelle et de 1,69 % pour un opérateur mixte adressant les clientèles professionnelle et résidentielle.
Considérant le choix de la technologie de DSLAM, il apparaît qu'un opérateur optant pour une stratégie « entreprises » a vocation à utiliser des DSLAM ayant une structure de coûts comparable au modèle Alcatel présenté ci-dessus, pour lesquels les cartes ADSL et SDSL ont le même nombre de ports. Ce modèle de DSLAM aboutit à des coûts moyens par ligne inférieurs à ceux du modèle ECI, dans le cas « entreprises ». En vertu du principe d'efficacité, l'Autorité retient donc ces tarifs de DSLAM pour le cas « entreprises ».
Pour un opérateur mixte, en revanche, le nombre de ports ADSL utilisés est bien supérieur dès lors qu'il adresse le marché résidentiel. Cet opérateur a donc vocation à utiliser des DSLAM permettant de réduire sensiblement le coût du port ADSL. Le coût moyen par ligne mis en évidence par le modèle est inférieur, pour un opérateur mixte, avec le modèle ECI ; en vertu du principe d'efficacité, ce modèle de DSLAM est retenu pour l'opérateur mixte.
Durée d'amortissement des FAS et des frais de résiliation
Colt fait état d'une durée de vie moyenne de cinquante-quatre mois pour ses clients professionnels, tandis que France Télécom s'accorde sur la durée de trente-six mois proposée par les rapporteurs.
Considérant que les contrats clients sur le marché professionnel ont des durées de un, trois ou cinq ans, et que l'intensification de la concurrence a tendance à diminuer la durée des contrats effectifs, l'Autorité retient une durée de vie moyenne des contrats clients de trois ans.
Taux de croissance du dégroupage
Les rapporteurs ont évalué que le taux de croissance moyen du dégroupage professionnel sur une zone dégroupée est de 2 % par mois. France Télécom corrobore ce chiffre, tandis que Colt indique préférable de considérer une augmentation en valeur absolue de 2,5 lien/répartiteur/mois.
Sur les répartiteurs les plus denses, concernés par le dégroupage, ces deux approches conduisent à des résultats, en termes de coûts de l'accès, très similaires. L'Autorité retient donc une avance de phase de trois mois et un taux de croissance du dégroupage de 2 % par mois.
Nombre de lien intrabâtiment (LIB)
L'Autorité retient une ingénierie de 1 LIB par site et par opérateur professionnel, chiffre corroboré par les parties.
Taux de résiliations facturées
L'Autorité retient un taux de 100 % des résiliations qui sont facturées, chiffre corroboré par les parties.
Taux de contribution aux coûts communs
Le taux considéré par l'Autorité est le même que celui retenu pour France Télécom, soit 5,78 % pour les années 2006 et 2007.
Paramètres spécifiques au marché professionnel
Plusieurs tarifs de l'offre de référence dégroupage sont spécifiques au marché professionnel : il s'agit de l'aboutement de tronçons, du branchement, des options de garantie de temps de rétablissement (GTR), de la recette contradictoire et de la possibilité de choisir, dans le cas d'un accès SDSL, entre une, deux ou quatre paires.
Les statistiques transmises par Colt sur les six derniers mois sur ses commandes de dégroupage total montrent que l'aboutement de tronçons est quasi-systématique alors que le branchement n'est pratiquement jamais nécessaire.
L'Autorité estime donc que les options de l'offre de référence à retenir pour comparer l'accès dégroupé à l'accès DSL entreprises sont une GTR standard de quatre heures ouvrées, qui est celle incluse dans la prestation standard DSL Entreprises, avec un aboutement de tronçon, une recette contradictoire, mais pas de branchement.
Déploiement et part de marché d'un opérateur alternatif efficace
Le déploiement le plus large des opérateurs alternatifs « entreprises » annoncé pour la période retenue par l'Autorité est celui de Completel, avec 250 répartiteurs couverts. L'Autorité retient donc comme paramètres permettant de modéliser un opérateur alternatif efficace « entreprises » une couverture de 250 répartiteurs et une part de marché de 15 % sur le marché considéré.
Pour un opérateur mixte, stratégie que seule Neuf Cegetel suit à grande échelle, une couverture de 1 000 répartiteurs est retenue, cohérente avec l'extension constatée en France. L'Autorité retient par ailleurs une part de marché de 15 % sur l'ensemble des marchés professionnel et résidentiel, pour modéliser un opérateur mixte efficace.
Colt fait valoir qu'un opérateur peut faire le choix du dégroupage même à un coût de court terme supérieur à l'offre professionnelle régionale, dans la mesure où le dégroupage est une solution plus pérenne qui garantit une maîtrise des coûts - notamment de collecte - et présente un coût marginal plus faible que l'offre DSL Entreprises.
L'Autorité s'accorde sur ce point. Dans l'approche retenue, les modélisations retiennent des parts de marché cibles de 15 %, bien supérieures à celle obtenue aujourd'hui par Colt. La modélisation vise à traduire, via une part de marché cible, que sur le long terme le choix du dégroupage est plus avantageux que celui de l'offre régionale. A court terme cependant, dans une phase de conquête de parts de marché, le coût de l'opérateur en dégroupage, ramené à la ligne, peut être bien supérieur à celui de l'offre professionnelle régionale.
5.3.3. Conclusion sur les coûts de l'opérateur « entreprises »
Sur la base des paramètres décrits précédemment, l'Autorité estime que le coût par ligne dégroupée pour un opérateur « entreprises », s'établit à 47 euros par mois en ADSL et à 48 euros par mois en SDSL, sur le dernier répartiteur ouvert.
En vertu des principes de tarification exposés en partie 5.2, il apparaît que ces niveaux de 47 euros pour l'ADSL et 48 euros pour le SDSL constituent donc des planchers pour le tarif de l'offre de gros régionale, en deçà desquels le déploiement retenu pour le dégroupage pour un opérateur « entreprises » n'est pas rentable économiquement.
5.3.4. Conclusion sur les coûts de l'opérateur « mixte »
Pour un opérateur mixte et sur la base des paramètres décrits précédemment, l'Autorité estime que le coût par ligne dégroupée s'établit à 32 euros par mois en ADSL et 46 euros par mois en SDSL, sur le dernier répartiteur ouvert.
Il apparaît donc que les niveaux de 47 euros pour l'ADSL et 48 euros pour le SDSL calculés ci-avant ne sont pas de nature à constituer des niveaux d'éviction pour un opérateur alternatif ayant recours au dégroupage et visant à la fois les marchés résidentiel et professionnel.
5.4. Evaluation des coûts de France Télécom
Le positionnement des coûts de France Télécom par rapport à ceux des opérateurs alternatifs dégroupeurs n'est pas immédiat. D'une part, France Télécom bénéficie de fortes économies d'échelle et d'envergure, grâce à sa part de marché globale élevée et sa présence sur le marché résidentiel utilisant les mêmes infrastructures. France Télécom dispose également d'une importante puissance d'achat, lui permettant d'obtenir, de la part de ses fournisseurs, des remises plus importantes que celles octroyées à ses concurrents. D'autre part, sa couverture est bien plus large que celle des opérateurs alternatifs, elle dessert donc des répartiteurs moins rentables.
France Télécom liste dans ses écritures une série des coûts complets pour la prestation d'accès, issus, pour partie, de ses comptes réglementaires. L'Autorité constate néanmoins que, dans le cadre du présent litige, ces coûts agrégés et peu documentés ne permettent pas à eux seuls d'apprécier correctement les coûts encourus par France Télécom pour ces activités.
Les éléments fournis à l'Autorité sont en effet insuffisamment détaillés et, malgré la demande des rapporteurs, France Télécom n'a pas fourni de pièces justificatives suffisamment précises permettant de juger de la pertinence des activités concernées, ni du périmètre exact des produits inclus dans ces restitutions, ce dont l'Autorité ne dispose pas par ailleurs. Au total, les éléments transmis par France Télécom ne permettent donc pas de corroborer cette liste de coûts.
Ainsi par exemple, il apparaît que les activités R-1-BL-LIV-LL et R-1-BL-SAV-LL, par leur intitulé et ce que les audits réglementaires précisent, sont attachées au réseau RTNM, c'est-à-dire au réseau de liaisons louées. Ils ne concernent donc pas uniquement l'offre Turbo DSL/DSL Entreprises, mais sont issus d'un compte plus large visant les liaisons louées, et ont donc probablement fait l'objet d'une allocation préalable. Or aucun élément fourni à l'Autorité ne permet d'apprécier la pertinence de ces activités dans le cadre de cette prestation ni le périmètre des produits sur lequel cette restitution de coûts porte.
Par ailleurs, il semble que les coûts unitaires transmis soient issus des coûts prévisionnels 2005 rapportés au parc de lignes 2004 ; le manque d'homogénéité de ce calcul le rend peu exploitable.
Dans ces conditions, au vu des seuls éléments fournis par l'opérateur, l'Autorité ne dispose pas de tous les éléments pour fonder sa décision. Aussi a-t-elle procédé à des contrôles de cohérence.
S'agissant des coûts de DSLAM et de leur environnement technique (renvoi cuivre, énergie et occupation au sol notamment), France Télécom évalue un coût complet par port SDSL de 94 euros par mois, et de 5 euros par mois par port l'ADSL sans apporter d'élément de nature à justifier ses évaluations. L'Autorité estime ces montants surévalués compte tenu des éléments de coûts dont elle a connaissance.
Pour évaluer le coût des DSLAM, l'Autorité a eu recours à une modélisation similaire à celle explicitée dans la partie 5.3.2, mais en retenant des paramètres représentatifs de la situation de France Télécom, soit une part de marché de France Télécom de 70 % sur le marché résidentiel, de 95 % sur le marché professionnel, une couverture de 8 000 répartiteurs et un taux de rémunération du capital de 9,8 %.
Cette approche a été soumise aux parties dans le cadre d'un questionnaire des rapporteurs ; France Télécom n'y a pas apporté d'objection.
France Télécom indique retenir la gamme de DSLAM ECI dans les calculs de coûts de remplacement prévisionnels 2005, en tant que meilleure technologie disponible.
France Télécom, en tant qu'opérateur « mixte », a effectivement vocation à utiliser des DSLAM ECI, du fait du grand nombre de clients qu'elle dessert en ADSL. La gamme de DSLAM ECI est donc retenue par l'Autorité pour évaluer les coûts de France Télécom.
Les mêmes prix que ceux exposés dans la partie 5.3.2 de la présente décision sont retenus. Il est enfin tenu compte en sus de ces montants d'un coût d'installation du DSLAM égal à 10 % de son coût total et d'un coût annuel d'exploitation de 10 % du coût d'investissement, conformément à la formule retenue dans le cas du modèle de l'accès. Sont également pris en compte l'ensemble des coûts lié à l'environnement technique des DSLAM (énergie, renvoi cuivre, espace au sol...).
Au terme de cette analyse, le coût moyen par ligne du DSLAM ECI, environnement technique compris, estimé par le modèle, apparaît être de 3,4 euros en ADSL et de 9,2 euros en SDSL.
S'agissant des frais liés à la mise en service, France Télécom présente [...].
L'Autorité rappelle cependant que France Télécom facture déjà 300 euros de frais d'accès au service par ligne, et qu'il convient de ne pas recouvrer deux fois ce montant.
Aussi, les seuls coûts de mise en service qu'il est pertinent de retenir dans le cadre de l'évaluation du tarif mensuel de l'accès s'estiment en retranchant le montant de ces FAS mensualisés sur 36 mois, déjà payés par ailleurs, au chiffre de 9,76 euros par ligne et par mois évalué par France Télécom.
Partant des évaluations fournies par France Télécom, et tenant compte de ces deux remarques, l'Autorité estime que le total des coûts de France Télécom est inférieur à 38 euros par mois et par accès en ADSL et à 44 euros par mois et par accès en SDSL.
Il n'est donc pas nécessaire d'affiner plus avant l'examen des coûts de production de France Télécom, puisque ce niveau de coûts plafond est inférieur au niveau d'éviction par rapport au dégroupage.
L'Autorité n'a donc pas procédé à sa propre évaluation des postes de coûts fournis par France Télécom en dehors des coûts de DSLAM. Compte tenu de l'insuffisance des justifications fournies par France Télécom pour ces autres montants, les coûts obtenus ci-dessus ne peuvent donc être considérés que comme des valeurs maximales.
Finalement, il apparaît donc que les tarifs de 47 euros par ligne et par mois pour l'ADSL et de 48 euros par ligne et par mois pour le SDSL permettent à France Télécom de recouvrer ses coûts de production.
5.5. Conclusion sur le niveau tarifaire de l'accès
5.5.1. Remarques concernant l'offre belge
Colt a fourni au cours de l'instruction une comparaison tarifaire de la prestation d'accès proposée par France Télécom avec celle de l'offre de gros d'accès large bande livrée au niveau régional de Belgacom en France, Broba II. Les tarifs de l'accès de cette offre de gros sont de 18,40 euros par mois pour l'ADSL et de 19,48 euros par mois pour le SDSL.
Les obligations imposées par le régulateur belge à Belgacom sur ce marché diffèrent de celles imposées par l'Autorité à France Télécom. L'offre belge est orientée vers les coûts. Une obligation différente s'applique en France, qui tient compte des coûts d'un opérateur alternatif ayant recours au dégroupage afin de permettre au dégroupage de concurrencer l'offre de gros régionale.
Dès lors que son niveau est inférieur au tarif d'éviction évalué pour le cas français, l'Autorité considère que le niveau tarifaire de l'offre Broba II n'apparaît pas comme une référence pertinente dans le cadre du présent litige.
5.5.2. Conclusion
Il apparaît donc que, s'agissant du tarif mensuel de l'accès pour l'offre de gros régionale professionnelle :
- le niveau minimal ne conduisant pas à un tarif d'éviction du dégroupage est de 47 euros par mois pour l'accès ADSL et de 48 euros par mois pour l'accès SDSL une paire ;
- l'évaluation des coûts de France Télécom conduit à un montant inférieur à ce niveau.
En conséquence, l'Autorité estime que le tarif mensuel de la prestation d'accès doit être fixé à 47 euros par mois pour une paire ADSL et à 48 euros par mois pour une paire SDSL, pour des frais d'accès au service inchangés à 300 euros.
6. Sur la prestation de raccordement
6.1. Remarque préliminaire
La demande de Colt porte sur le tarif mensuel du raccordement dans le cas où il est réalisé en mode colocalisé, c'est-à-dire où les équipements de l'opérateur sont situés sur le site de France Télécom. Le tarif de la prestation de raccordement est constitué de deux éléments :
- des frais d'accès au service (FAS) d'une part, de 1 500 euros lorsque le site central dispose déjà d'un raccordement en fibre optique et 4 500 euros dans le cas contraire ;
- une redevance mensuelle d'autre part ; historiquement, cette redevance a été différenciée en fonction des débits maximum autorisés sur le lien de raccordement ; depuis l'été 2005, le tarif est de 888 euros par mois pour un débit inférieur ou égal à celui d'un lien STM1.
Les demandes de Colt portent uniquement sur le montant de la redevance mensuelle, à FAS inchangés. Ce périmètre de demande a été confirmé par France Télécom, en ce qu'elle n'a pas fait état dans ses écrits d'une éventuelle subvention croisée entre coûts ou tarifs d'installation et coûts ou tarifs récurrents.
Le périmètre d'analyse du présent règlement de différend est donc la redevance mensuelle du raccordement, entendu à FAS constant. Ce périmètre est considéré comme pertinent par l'Autorité au vu des écritures des parties.
6.2. Architecture technique de la prestation
Les parties s'accordent sur le périmètre couvert par la prestation de raccordement telle que fournie à ce jour par France Télécom. Cette prestation correspond en la fourniture d'un lien entre le dernier équipement du réseau actif de France Télécom, c'est-à-dire son brasseur ATM, et le répartiteur optique précédant le premier équipement actif du réseau de Colt qui est un équipement de transmission localisé dans les locaux de France Télécom.
A ce jour, la prestation de raccordement fournie par France Télécom comprend les équipements suivants :
- un port STM1, situé en sortie du dernier brasseur ATM de France Télécom ; alors que le reste du réseau de France Télécom est partagé entre les différents opérateurs, dont France Télécom elle-même, le port de sortie est matériellement immobilisé pour l'opérateur interconnecté au réseau ATM ;
- un lien en fibre optique permettant de relier ces équipements de France Télécom à ceux de Colt ; ce lien en fibre optique est dédié à l'opérateur client ;
- un équipement d'accès au service, dénommé EAS dans la suite du texte ; cet équipement est utilisé pour superviser les flux et détecter les incidents ; les parties ne s'accordent pas sur l'utilité fonctionnelle de l'EAS, point qui est discuté ci-après.
L'EAS permet notamment la supervision des conduits de collecte et la délimitation de la responsabilité entre France Télécom et l'opérateur client. Selon l'architecture retenue par France Télécom, un EAS est dédié à un seul client.
France Télécom a indiqué oralement lors de la visite du site de Tremblay-en-France qu'elle estimait que l'EAS était un équipement « indispensable pour livrer et gérer VC par VC le trafic du client » et que « sans EAS, la continuité du VC de bout en bout n'est plus réalisée et par conséquent le service TDSL n'est plus délivré, en effet, l'EAS est le seul équipement qui permet l'identification des VC ».
France Télécom a ajouté lors de l'audience du 13 décembre 2005 que, contrairement à l'EAS, les brasseurs ATM ne pouvaient pas gérer la fonction de rate-limiting consistant à réaliser la limitation de débit montant et descendant à celui vendu de la porte Turbo DSL dans le cadre du contrat. En réponse à France Télécom, Colt a indiqué que la fonction de rate-limiting ne joue que sur le tarif des portes non colocalisées.
France Télécom a indiqué utiliser elle-même des EAS pour le compte de Transpac. L'Autorité note que les représentants de France Télécom n'étaient pas habilités pour entrer dans la salle de Transpac et pour autoriser les agents de l'Autorité à constater de visu cette affirmation.
Colt estime en revanche que la présence de l'EAS n'est pas techniquement indispensable. Elle indique que cet équipement est redondant par rapport aux capacités d'administration du dernier brasseur ATM auquel il est relié. A titre d'exemple, elle précise que les brasseurs Alcatel utilisés dans son propre réseau disposent de fonctions suffisantes pour assurer la supervision des flux. Colt indique que ses brasseurs ATM, notamment les Newbridge, sont de même génération que ceux utilisés par France Télécom. Par ailleurs, Colt ajoute que la prestation de raccordement proposée par Cegetel à Colt ne comporte pas d'EAS. De même, Colt précise que le service Broba II en France ne comprend pas systématiquement d'EAS.
L'Autorité note que la notice publique du brasseur 7670 Alcatel semble indiquer que ce brasseur gère les fonctionnalités nécessaires et suffisantes à la supervision des flux. Parmi les fonctionnalités listées par la notice du brasseur RSP7670, on trouve notamment : « hierarchical QoS ; bandwidth reservations per IP CoS, LSP, VC (hierarchical connection admission) ; per-IP flow, LSP and VC queuing and shaping at ingress and egress ; per-IP flow, LSP and VC fairness and flow control » ainsi que « Point-to-point and point-to-multipoint PVCs, SVCs and S-PVCs ». L'Autorité note par ailleurs que cet équipement est utilisé par France Télécom, notamment sur le site de Raspail visité dans le cadre du présent litige.
France Télécom semble être le seul opérateur français de grande envergure à utiliser des EAS en coeur de réseau. En France, ce type d'équipement est mentionné dans l'offre de référence mais, d'après les éléments transmis par Colt, il n'est pas utilisé systématiquement. Finalement, la demande mondiale d'EAS ne semble pas extrêmement dynamique, France Télécom ayant indiqué utiliser un modèle qui n'évolue pas depuis trois ans et n'a pas de successeur.
Dans ses écritures, sans mettre en avant un éventuel caractère indispensable, France Télécom indique avoir fait le choix consistant à mettre en oeuvre un certain nombre de fonctionnalités, notamment de supervision, au niveau de l'EAS et non au niveau des brasseurs selon un critère d'optimisation technico-économique globale. France Télécom indique en effet qu'une refonte de l'architecture réseau consistant à gérer ces fonctionnalités via les brasseurs engendrerait des coûts de système d'information et des coûts de formation des techniciens substantiels et non recouvrables.
L'Autorité considère, au vu des écritures des parties, que :
- les fonctions assurées par les EAS recoupent en grande partie celles des routeurs ATM récemment installés par les principaux opérateurs, dont France Télécom ;
- l'installation d'EAS peut toutefois optimiser le coût global de la prestation de collecte, l'absence d'exploitation des fonctions internes des routeurs et leur remplacement par un EAS externe, représentant dans les faits, du moins à court terme, une économie.
6.3. Principes de tarification
La décision no 2005-0280 de l'Autorité prévoit que les tarifs des offres de gros d'accès large bande livrées au niveau régional reflètent les coûts correspondants, sauf s'ils provoquent un effet d'éviction sur le dégroupage.
S'agissant du tarif du raccordement de l'offre régionale professionnelle, objet du présent litige, il apparaît cependant que les tarifs de l'offre régionale professionnelle ne sont pas susceptibles de provoquer l'éviction des opérateurs ayant recours au dégroupage.
En effet, la prestation de raccordement offerte par France Télécom aux opérateurs n'a pas d'équivalent pour un opérateur intégré ayant recours au dégroupage et servant directement le marché de détail. Pour cet opérateur, le poste de coût lié au raccordement est inexistant.
Par ailleurs, pour un opérateur dégroupeur servant le marché de gros, qui proposera une prestation de raccordement à ses clients, il apparaît que le périmètre de la prestation est bien plus réduit que dans le cas de France Télécom, puisque l'EAS n'est pas utilisé par ce type d'opérateur.
Ainsi, dans les deux cas, le coût encouru par un opérateur dégroupeur pour la prestation équivalente au « raccordement » de l'offre régionale professionnelle est inférieur à celui de la prestation fournie par France Télécom, voire nul.
De ce fait, un tarif du raccordement fondé sur le principe du reflet des coûts correspondants ne peut donc donner lieu à un tarif d'éviction par rapport au dégroupage. Au regard de la décision no 2005-0280 de l'Autorité en date du 19 mai 2005, la prestation de raccordement doit donc refléter les coûts correspondants.
Colt demande une modification du tarif du raccordement, en ce que celui-ci constituerait une barrière à son développement, compte tenu de sa taille. France Télécom ne répond pas à ce moyen.
L'Autorité considère que, sinon les coûts, du moins les principes de tarification du raccordement induisent de fait un désavantage compétitif pour la société Colt :
- avec un déploiement sur 130 raccordements, et compte tenu de son parc, France Télécom supporte pour ses propres services (Transpac) un coût moyen inférieur à 1 euro par mois et par liaison ;
- avec son déploiement actuel Colt supporte un coût de raccordement d'environ 10 euros par liaison et par mois ; si elle avait le même déploiement que Transpac, elle supporterait un coût de raccordement de plus de 50 euros par mois et par liaison.
L'Autorité note que, sur certains sites, Colt est présente à proximité du brasseur de France Télécom mais n'ouvre pas de porte, du fait de son tarif élevé à la ligne.
L'Autorité considère souhaitable qu'à l'avenir le niveau tarifaire des portes ne constitue pas en soi une barrière au déploiement de l'opérateur.
Dans ce contexte, les éléments de coût retenus par l'Autorité pour évaluer le tarif mensuel de la prestation de raccordement sont les suivants.
France Télécom a fourni dans ses réponses au questionnaire des rapporteurs l'interrogeant sur les coûts du port STM1 et de l'EAS des montants globaux, sans justification et non détaillés.
L'Autorité considère qu'il appartient à France Télécom d'apporter la preuve des coûts sous-jacents à ses tarifs. Au cas d'espèce, les montants indiqués par France Télécom ne permettent pas de reconstituer le tarif global de la prestation de raccordement telle que proposée par France Télécom dans son offre.
En l'absence de précision de la part de France Télécom à ce sujet, l'Autorité considère que les éléments de coûts communiqués par France Télécom constituent l'enveloppe des coûts pertinents pour évaluer les tarifs objets du présent litige.
Concernant le coût du port STM1, France Télécom a transmis un coût marginal d'investissement, incluant le lien optique. Cette enveloppe de coût est pertinente, dans la mesure où le port STM1 constitue une sous-partie d'un brasseur ATM : le coût complet du brasseur ATM, incluant son exploitation et les charges indirectes correspondantes, est recouvré par le biais de la tarification de collecte. Afin d'éviter tout double recouvrement des coûts, seul le surcoût direct d'investissement dans un port supplémentaire est pertinent pour le tarif du raccordement.
Concernant l'EAS, au regard de l'écart d'un facteur 7,5 entre les coûts communiqués par France Télécom et par Colt pour la prestation d'EAS, il apparaît probable que les coûts communiqués par France Télécom sont des coûts complets et non des coûts d'achat directs des équipements.
Toutefois, l'Autorité relève que, quand bien même les coûts communiqués par France Télécom ne seraient pas les coûts complets de la prestation, il n'est pas illégitime de tarifer la prestation de raccordement de manière à ne couvrir que ce coût direct d'investissement.
En effet, une telle tarification au coût direct d'investissement est de nature à minimiser les seuils de rentabilité d'une ouverture de porte, et donc à réduire le désavantage des opérateurs peu capillaires. Cette méthode de tarification est de nature à favoriser la concurrence à long terme, par le développement d'infrastructures capillaires, et donc d'optimiser les avantages in fine pour le consommateur, conformément aux objectifs énoncés par l'article D. 311 du CPCE.
Par ailleurs, France Télécom a indiqué que l'installation de l'EAS lui permettait de réaliser des économies globales : facturer des coûts indirects sans prendre en compte ces économies pourrait donc conduire à un double recouvrement des coûts.
Enfin, la prestation de raccordement ne constitue que 1 à 2 % du chiffre d'affaires de France Télécom pour l'offre régionale professionnelle. Or les tarifs de l'accès, qui représentent quant à eux une part importante du chiffre d'affaires de France Télécom pour cette même offre, sont fixés à un niveau sensiblement supérieur aux coûts de France Télécom, pour ne pas donner lieu à l'éviction des opérateurs ayant recours au dégroupage. Ainsi, la prestation globale « accès et raccordement » permet à France Télécom de couvrir l'ensemble de ses coûts, même pour un tarif du raccordement ne tenant pas compte des coûts indirects.
6.4. Evaluation du tarif
Le coût du port STM1, incluant le lien optique fourni par France Télécom dans sa réponse au premier questionnaire des rapporteurs est de 3 500 euros pour une durée d'amortissement de six ans et un progrès technique de 33 % par an. Colt fournit un coût du port STM1 légèrement supérieur pour une durée d'amortissement de cinq ans et n'incluant pas le coût du lien optique. En conséquence, l'Autorité retient un coût d'investissement de 3 500 euros, un progrès technique de 33 % par an et une durée d'amortissement de six ans. L'Autorité considère ces coûts comme l'enveloppe globale de coûts pertinents, compte tenu de ce qui a été exposé ci-avant et de l'absence de précision apportée par France Télécom.
En ce qui concerne le modèle d'EAS à retenir, France Télécom et Colt ont indiqué, dans leurs réponses au questionnaire, que le type d'équipements EAS retenus par France Télécom dans le cadre de l'offre Turbo DSL/DSL Entreprises est le modèle RAD ACE 2002, dont les descriptifs techniques sont disponibles sur le site internet www.rad-France.fr. Ce produit supporte à la fois des interfaces STM1 et STM4.
Concernant la valorisation de l'EAS, France Télécom indique un coût de 7 550 euros dans sa réponse au premier questionnaire des rapporteurs, sans préciser s'il s'agit d'un coût d'investissement ou d'un coût complet et sans fournir de pièces justificatives. Colt estime le coût d'investissement de l'EAS à 1 000 euros. L'Autorité retient un coût de 7 550 euros pour cet équipement. L'Autorité considère ce coût comme l'enveloppe globale de coûts pertinents, compte tenu de ce qui a été exposé ci-avant et de l'absence de précision apportée par France Télécom.
La durée de vie à retenir pour l'EAS est de trois ans selon France Télécom, et de cinq ans pour Colt. Dans la décision no 2003-27 de l'Autorité sur le différend entre les sociétés LDCOM et France Télécom, la durée de vie retenue était de cinq ans. France Télécom utilisait déjà en partie le modèle RAD ACE 2002 au début de 2003 et il n'a nullement été fait mention d'une obsolescence de cet équipement lors de la visite effectuée sur le site de Raspail dans le cadre du présent règlement de différend. L'Autorité retient donc une durée d'amortissement de cinq ans.
France Télécom ayant indiqué que le modèle RAD ACE 2002 n'évoluait plus depuis trois ans et n'avait pas de successeur, l'Autorité retient un taux de progrès technique nul pour cet équipement.
Pour déterminer le coût récurrent, l'Autorité utilise la méthode des coûts de remplacement en filière, les annuités étant calculées à mi-année et en tenant compte du taux de rémunération du capital fixé dans la décision no 2005-1079 de l'Autorité en date du 6 décembre 2005. Compte tenu de ces éléments, le coût mensualisé du raccordement est au maximum égal à 265 euros par mois.
Il est à noter que le calcul exposé ci-avant tend à majorer le coût réellement supporté par France Télécom, tant dans le coût de l'EAS retenu que de la non-prise en compte des économies globales que, selon France Télécom, sa présence génère. L'Autorité s'attend donc à ce qu'un tarif du raccordement reflétant les coûts correspondants ne soit pas nécessairement positionné au plafond calculé ci-avant.
Finalement, l'Autorité constate que le plafond tarifaire précédemment calculé reste très nettement supérieur au tarif indiqué dans l'offre de gros d'accès large bande livrée au niveau régional de Belgacom en France, Broba II. La différence s'explique par la différence de périmètre technique et par la non-installation systématique d'EAS en France.
6.5. Conclusion sur le niveau tarifaire du raccordement
En conséquence, le tarif mensuel du raccordement en cas de colocalisation ne saurait excéder 265 euros par mois, à périmètre technique et frais d'accès au service de la prestation inchangés.
7. Sur la date d'application des tarifs de l'offre DSL Entreprises
Dans ses conclusions en date du 14 octobre 2005, Colt demande l'application des tarifs de l'offre DSL Entreprises de France Télécom, telle que modifiée à la suite des demandes 2° et 3° de Colt, à compter du 22 juin 2005.
France Télécom indique que l'Autorité ne saurait faire droit à une telle demande et venir modifier son offre avant sa première publication. Elle souligne que la décision no 2005-0280 ne prévoit pas d'opposabilité des nouvelles obligations réglementaires en la matière au 22 juin 2005.
Toutefois, en vertu de l'article L. 36-8 du CPCE, il incombe à l'Autorité de préciser les conditions équitables d'ordre technique et financier de l'accès « sur l'ensemble de la période litigieuse », ainsi que l'indique la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 20 janvier 2004 relatif à l'affaire UPC/France Télécom.
Ainsi, il ressort des pièces du dossier que, dès le 8 juillet 2005, Colt a demandé à France Télécom une réduction des tarifs de l'offre Turbo DSL afin qu'elle soit en conformité avec les obligations définies par la décision no 2005-0280 de l'Autorité en date du 19 mai 2005 et notifiée le 27 juin 2005 à France Télécom.
La période litigieuse a donc commencé le 8 juillet. En conséquence, l'Autorité estime équitable de retenir la date du 8 juillet 2005 pour l'application de la présente décision.
L'Autorité confirme que France Télécom disposait d'un mois à compter de la date de notification de la décision no 2005-0280, pour publier une offre de référence. En revanche, l'ensemble des autres obligations, et en particulier les obligations tarifaires, s'appliquent depuis la date de notification, soit le 27 juin 2005, ainsi que le prévoit l'article 12 de la décision susvisée.
S'agissant des prestations d'accès et de raccordement, l'Autorité a déterminé, dans les parties 5 et 6 de la présente décision, les tarifs conformes aux obligations tarifaires qui s'imposent à France Télécom.
S'agissant des autres postes tarifaires de l'offre, l'Autorité note que France Télécom a publié une nouvelle offre et de nouveaux tarifs le 27 juillet 2005, différents de ceux de Turbo DSL, afin de mettre l'offre en conformité avec les obligations tarifaires lui incombant suite à l'entrée en vigueur de la décision no 2005-0280 de l'Autorité.
Notamment, s'agissant de la prestation de collecte, France Télécom a modifié, avec la publication de l'offre de référence DSL Entreprises, la structure tarifaire de son offre DSL professionnelle régionale en distinguant les prestations d'accès et de collecte et en harmonisant les tarifs de sa prestation de collecte ATM avec ceux de l'offre DSL résidentielle régionale. Colt indique, dans sa saisine du 19 août 2005, en page 2, que « la nouvelle offre DSL Entreprises tient compte des demandes de Colt quant à la prestation de collecte ATM ».
Dans le cadre du présent règlement de différend, Colt ne formule aucune demande de modification des tarifs de l'offre DSL Entreprises hormis les tarifs mensuels de l'accès et du raccordement colocalisé étudiés en parties 5 et 6.
L'Autorité constate que ces tarifs satisfont les deux parties en ce qu'ils ont été proposés par France Télécom elle-même et n'ont pas été critiqués par Colt.
S'agissant de la date d'application de ces tarifs, l'Autorité constate que France Télécom a différé leur application au 1er décembre 2005. L'Autorité constate que France Télécom n'a apporté, au cours de l'instruction, aucun élément justifiant le décalage temporel entre la date d'entrée en vigueur de ses obligations tarifaires issues de l'analyse des marchés et la date à laquelle elle se propose d'appliquer la nouvelle grille tarifaire.
S'agissant de la demande de Colt de ne pas se voir appliquer de frais de migration ni de migration technique à l'occasion du passage vers une nouvelle grille tarifaire, celle-ci est conforme à l'article 2 de la décision no 2005-0280 de l'Autorité.
En conséquence, l'Autorité décide que la grille tarifaire figurant dans l'offre DSL Entreprises, modifiée conformément à la présente décision pour les tarifs mensuels de l'accès et du raccordement, s'applique à la date du 8 juillet 2005, date du début de la période litigieuse, sans frais de migration, ni coûts supplémentaires, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que la date d'entrée en application des nouveaux contrats DSL Entreprises telle qu'indiquée dans l'offre de référence soit fixée au 1er décembre 2005,
Décide :
Article 1
Le tarif mensuel de l'accès de l'offre DSL Entreprises est fixé à 47 euros hors taxes pour l'accès ADSL et à 48 euros hors taxes pour l'accès SDSL une paire, pour un niveau de frais d'accès au service de 300 euros hors taxes.Article 2
Le tarif mensuel du raccordement de l'offre DSL Entreprises, pour un raccordement colocalisé de 155 Mbit/s, n'excédera pas 265 euros hors taxes par mois.Article 3
A compter du 8 juillet 2005, France Télécom appliquera, sans frais de migration, ni coûts supplémentaires, la grille tarifaire de DSL Entreprises ainsi modifiée à l'ensemble des liaisons du parc de Colt Télécommunications France relevant du marché de gros des accès large bande livrés au niveau régional et destinés in fine à la clientèle professionnelle, c'est-à-dire celles souscrites au titre des offres Turbo DSL et DSL Entreprises.Article 4
France Télécom devra appliquer la présente décision et mettre en conformité le contrat signé avec Colt Télécommunications France dans un délai de quatre semaines à compter de sa notification.Article 5
Le surplus des demandes formulées par les parties est rejeté.Article 6
Le chef du service juridique ou son adjoint est chargé de notifier aux sociétés Colt Télécommunications France et France Télécom la présente décision, qui sera rendue publique, sous réserve des secrets protégés par la loi, et qui sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 15 décembre 2005.
Le président,
P. Champsaur
[...] passages relevant des secrets protégés par la loi.